Menu
Libération
Interview

«Nous sommes face à un objet mal identifié»

Emmanuel Gabla, du Conseil supérieur de l’audiovisuel :
par Guillaume DASQUIE
publié le 12 octobre 2010 à 0h00

Au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), Emmanuel Gabla pilote le dossier des jeux en ligne. Il espère que télés et radios adopteront un code de déontologie avant janvier.

Les jeux en ligne risquent-ils de pervertir le journalisme sportif ?

Nous sommes vigilants pour que les émissions sportives n’évoluent pas en publicité déguisée pour les sites de paris en ligne. Il existe un risque, bien réel, que le commentaire sportif ne serve plus qu’à accompagner une incitation au jeu. Pour cette raison, nous n’avons pas accepté qu’à la télé et à la radio les cotes des matchs soient annoncées avec le nom d’un opérateur de jeux en ligne. La communication des cotes est acceptable, à condition que les émissions renvoient au site internet de la chaîne ou de la radio, et non pas vers le site de l’opérateur.

Cet été, au moment de la Coupe du monde de football, les choses se sont globalement bien passées, sauf sur une radio, où une porosité s’est installée entre le commentaire sportif et l’incitation à jouer.

Comme l’avait souligné dès le 18 mai, Michel Boyon, président du CSA, le Conseil veillera à ce que l’ouverture du marché des jeux en ligne ne dénature pas le contenu des émissions sportives. Après avoir autorisé la publicité commerciale et le parrainage par les sociétés de jeux en ligne, nous avons demandé aux chaînes d’éviter les tunnels de pub pour ce secteur.

Je travaille en ce moment avec les chaînes de télé et les radios pour encadrer ces volumes de publicité.

Dans des pubs, des ex-footballeurs invitent à parier sur des matchs, et, l’instant d’après, ils délivrent un commentaire sur ces matchs. Cela vous pose un problème ?

Nous allons réfléchir avec les éditeurs - les télés et les radios - pour définir clairement le travail du journaliste sportif et celui du pronostiqueur. Pourquoi faudrait-il interdire de faire les deux, dès lors que l’information est délivrée avec objectivité ?

Je ne suis pas convaincu à ce stade qu’il faille interdire les doubles casquettes pronostiqueur-commentateur, dès lors que les téléspectateurs sont clairement informés. Depuis la reprise du championnat de football, nous avons pu constater certaines dérives. Nous allons en discuter avec les chaînes de télévision et les stations de radio. Globalement, avec les jeux en ligne, nous sommes face à un objet mal identifié. C’est la raison pour laquelle, à titre exceptionnel, nous avons pris une délibération à durée de vie très courte, qui sera revue fin janvier 2011.

Pour quelle finalité ?

En janvier, Rachid Arhab et moi-même proposerons au Conseil de prendre des mesures, coercitives si nécessaire, en tout cas plus détaillées sur les aspects déontologiques. Si, pour l’heure, nous discutons, cette réflexion se traduira bien par des écrits. J’ignore encore si ça s’appellera une charte, mais il faudra que des principes soient arrêtés.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique