Obama tisse sa victoire sur la Toile

Le candidat démocrate a utilisé les réseaux du Net et Twitter pour construire sa campagne.
par Philippe Grangereau
publié le 4 août 2008 à 4h30

Barack Obama a inauguré un nouveau type de campagne électorale, axé sur l'hypercommunication. Les innombrables réseaux de volontaires que son équipe a tissés lui ont permis de remporter, au printemps, une victoire retentissante sur Hillary Clinton aux primaires démocrates.

Tribu de militants. C'est la première fois depuis le succès de Jimmy Carter, en 1976, qu'un rebelle parvient à prendre d'assaut l'inexpugnable citadelle de l'establishment démocrate, pourtant gardée par ses plus tenaces défenseurs. Son meilleur allié : les nouvelles technologies. Car, au-delà de son message de «renouveau», le bon usage de l'Internet lui a permis d'engranger, selon les sources, entre quatre et huit millions d'adresses de courriers électroniques grâce auxquelles il a pu mobiliser, à moindre coût et immédiatement, une tribu d'autant de militants en puissance.

Obama a commencé par battre le rappel sur son site web, très interactif : il permet à tout un chacun de faire un blog, de collecter de l'argent pour sa campagne ou bien de tisser des réseaux de militants au niveau national et, surtout, au niveau local. Plus de 800 000 personnes sont enregistrées sur un site de réseau social dédié (http://my.barackobama.com), en sus du million d'utilisateur du social network mis sur pied sur Myspace.com. Il existe désormais pas moins de 6 639 groupes locaux de militants d'Obama (certaines petites villes en possèdent plusieurs) sur le site Barackobama.com. Les militants qui s'abonnent à son Twitter (lire page 2), reçoivent régulièrement sur leurs téléphones portables des SMS qui les tiennent au courant des derniers événements, des meetings à venir, des débats et de l'humeur générale de la campagne.

Mobilisés par son message amplifié par le Web, plus de 1,5 million de personnes ont offert des dons à sa campagne via Internet. Barack Obama a parié dix fois plus de dollars qu'Hillary Clinton sur les nouvelles technologies : en insérant des bandeaux sur les sites d'information comme Politico.com, et en payant le moteur de recherche Google afin qu'il fasse apparaître des publicités de sa campagne lorsque l'utilisateur tape des mots clés contextuels (les «AdWords»). Aux Etats-Unis, tapez par exemple «politique» ou «bureau de vote». et surgit aussitôt une publicité pour Obama, qui est souvent adaptée à la région dans laquelle habite l'utilisateur. Obama a versé 2 millions de dollars à Google en 2007-2008, tandis qu'Hillary n'a pour sa part dépensé que 292 000 dollars, selon les chiffres de la commission électorale.

Stratégie commerciale.Bien sûr, ce n'est rien comparé aux sommes consacrées à la publicité télévisée (75 millions de dollars pour Barack Obama, 46 millions pour Hillary Clinton sur la même période). Mais c'est néanmoins ainsi qu'Obama est parvenu à mobiliser davantage de militants et de donateurs. Une enquête de l'institut Pew a démontré que, durant les dernières primaires, 17 % des Américains allaient sur l'Internet pour y trouver les informations politiques à même de les aider à se décider - le double de 2004. Et pas moins de 35 % vont sur le Net pour y regarder des vidéos en rapport avec la présidentielle.

Même le candidat républicain, John McCain, s'y est mis et ne le regrette pas. «Chaque dollar investi nous en amène trois ou quatre», explique Eric Frenchman, l'un des conseillers en communication de la campagne républicaine. Tout cela ressemble à une stratégie commerciale, et ce n'est pas un hasard. «Je veux mener cette campagne comme un business», avait ordonné Barack Obama à ses stratèges peu après le lancement de sa candidature. «Quand j'ai commencé cette campagne, notait le candidat en avril, devant 300 volontaires, je n'étais pas sûr d'être le meilleur des candidats, mais j'étais absolument certain qu'il était possible de créer la meilleure organisation politique qu'on ait jamais vue depuis trente ou quarante ans. Et c'est vous qui l'avez créée.»

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