Owni décolle de 22 Mars

par Isabelle Hanne
publié le 30 mai 2012 à 11h59

C'était dans les tuyaux depuis plusieurs semaines : la séparation du site d'info Owni.fr et de sa société éditrice 22 Mars a été officialisée vendredi. «Le media Owni devient, ce jour, une entité à part entière, distincte de 22 Mars, avec la création de Owni SAS» , pouvait-on lire sur la page Facebook de cet «Objet web non identifié» lancé, en 2009, sur fond d'engagement anti-Hadopi. «C'est le sens de l'histoire , avance Nicolas Voisin, cofondateur de 22 Mars. Les deux entités ont des structures et des cultures très différentes, et pas le même rapport à l'entreprise. Pour que ces unités d'affaire se développent, il fallait les scinder en deux.»

Deux nouvelles sociétés voient donc le jour : d'un côté 22 Mars, renommé Tactilize, trois salariés et une poignée de free-lances qui se concentreront sur le développement d'applications mobiles pour les médias. De l'autre, Owni, 18 salariés, qui devrait conserver son positionnement éditorial actuel, «dédié aux enjeux de pouvoirs et de société à l'ère du numérique» , précise le communiqué publié sur Facebook.

Parmi les nombreux faits d'armes du site, les « War Logs », une application permettant de visualiser les documents confidentiels de l'armée américaine divulgués par WikiLeaks, fin 2010. Ce nouvel Owni devrait être présidé par Didier Adès, 67 ans, journaliste qui a coanimé pendant vingt-huit ans l'émission Rue des entrepreneurs sur France Inter, avant d'être licencié pour «faute grave». Guillaume Dasquié, actuel directeur de la rédaction d'Owni, vient, lui, d'être nommé directeur de la publication. Selon Mediapart, le journaliste, qui a un temps collaboré à Libération , aurait tenté de vendre des documents de la DGSE aux avocats des victimes du 11 Septembre et ouvert un compte en Suisse pour acheter des informations. Drôle d'attelage…

Et quid de l'avenir économique d'Owni, maintenant qu'il n'est plus adossé à 22 Mars-Tactilize ? Le site, au graphisme très léché, fonctionne intégralement sans publicité. Chacune des deux sociétés devrait boucler une levée de fonds avant l'été. Au terme de l'augmentation de capital, Tactilize devrait devenir minoritaire dans Owni SAS. Et selon Nicolas Voisin, «il y a des investisseurs sur les deux unités d'affaires. Je suis serein : Owni et Tactilize ont les moyens d'avancer. Ils sont amenés à être pérennes, et même à grandir.» Éric Series, un homme d'affaire qui dirige le fonds Avenport, et déjà actionnaire d'Owni, devrait investir plus d'un million d'euros dans la société, le temps que le site trouve son modèle économique.

En interne, les salariés d'Owni ont «hâte que la situation soit complètement stabilisée» . Ces derniers mois ont été éprouvants pour la petite équipe de la soucoupe, le surnom des locaux d'Owni, près de la place de la République à Paris. Une rédaction accrochée aux bruits de couloirs et inquiète de voir certains salaires payés en retard.

Paru dans Libération du 28 avril 2012

A lire également :

- Un Owni se pose sur l'édition (juin 2011)

- Owni secoue la galaxie de l'info (novembre 2010)

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