Piratage: Google fait le bon élève

par Sophian Fanen
publié le 1er juin 2012 à 16h57

Google est-il coupable d'encourager le piratage en ligne? À nouveau accusé de ne pas censurer les résultats de son moteur de recherche, hier, la direction du groupe a plaidé la complexité de la question, estimant que les difficultés sont juridiques plutôt que techniques.

Le premier moteur de recherche du monde s'est défendu pendant la conférence annuelle du site d'informations spécialisées All Things Digital en Californie, où il a été pris à partie. La fronde était menée par Ari Emanuel, codirecteur général de l'agence de gestion des carrières de stars William Morris Endeavor -- une des plus importantes du monde, qui s'occupe entre autres de Robin Williams, Brian Wilson ou DJ Shadow. «S'ils n'arrêtent pas le vol de contenus c'est un problème» , a estimé ce dernier, assurant que Google et les câblo-opérateurs en ont la capacité, tout comme ils ont la «capacité de bloquer» la diffusion de «programmes de pornographie pédophile» en les faisant disparaître des résultats de recherche.

«C'est une comparaison injuste, lui a rétorqué Susan Wojcicki, vice-présidente de Google chargée de la publicité. La pornographie pédophile, quand on en voit, on sait que c'est de la pornographie pédophile; [mais] quand je vois des programmes sous droit d'auteur, je ne sais pas qui possède les droits.» Ari Emanuel est «mal informé, très mal informé , a-t-elle ajouté. Google fait tout son possible» pour lutter contre le piratage, avec notamment le système de reconnaissance des contenus Content ID , qui permet aux détenteurs des droits de tirer des bénéfices de leur diffusion ou de demander le retrait des vidéos en question.

«C'est une question de gestion, pas une question technique , a conclu Susan Wojcicki. Si on prend un paquet de programmes et un paquet d'avocats, et qu'on leur demande qui possède (les droits sur) tel programme, je suis sûre que les avocats ne seront pas d'accord.» .

Ce débat intervient quatre mois après l'échec devant le Congrès américain des projets de loi antipiratage Sopa et Pipa, qui avaient provoqué une levée de boucliers sans précédent. Google, avec Wikipédia, Facebook, Twitter, Yahoo!, ou encore eBay s'était alors mobilisé contre ces textes soutenus par Hollywood, l'industrie musicale et la Chambre de commerce américaine. Sopa et Pipa, comme nous l'expliquions ici , prévoyaient que tout site Internet, même situé en dehors du territoire américain, soit tenu responsable du contenu posté par ses utilisateurs et puisse être bloqué aux États-Unis s'il contient la moindre infraction au droit d'auteur. Les moteurs de recherche auraient également été mis en cause et interdits de publier un lien vers des sites contrevenant au droit d'auteur.

En réaction à ces coups de pression (législative, médiatique) à répétition des représentants des ayants droit, Google s'est lancé ces dernières semaines dans une campagne de communication afin de mettre en avant ses actions concrètes pour la protection du contenu sous droits d'auteur. Le 24 mai, le groupe présentait ainsi la nouvelle version de son Transparency Report , qui présente désormais sous forme graphique les removal requests , les liens bloqués dans Google Search après la demande d'un ayant droit, reçues depuis juillet 2011 (date du début de la mise en marche interne de l'outil).

Les demandes de suppression de liens par semaine. Source Google.

On avait pu y découvrir, à la surprise de beaucoup, que Microsoft est le champion du take down , avec par exemple 468627 liens vers ses produits (Windows et la suite Office avant tout) éjectés des pages de résultat de Google le mois dernier. Viennent ensuite les acteurs des loisirs et de la culture (le cinéma, la musique, la télé...). On avait aussi appris que Google gère actuellement «plus de 250000 demandes de retrait par semaine» , soit «plus que pour toute l'année 2009» .

Les organisations qui demandent le plus de retrait, et les ayants droit les plus actifs. Source Google.

Les moyens proposés par Google pour contrer la circulation de contenu soumis au droit d'auteur tel qu'il existe aujourd'hui se sont donc fortement développés, et Google voudrait bien que cela se sache. «La principale raison du retrait d'un lien est de loin la violation du droit d'auteur» , expliquait Google, ajoutant espérer que sa transparence affichée sur le sujet «contribuera à la discussion sur les solutions» à apporter au «problème de violation de copyright en ligne» .

(Avec AFP)

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