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Libération

Streaming : Rdio débrque en Frnce

par Sophian Fanen
publié le 4 mai 2012 à 10h42
(mis à jour le 4 mai 2012 à 10h42)

Plus personne ne pourra râler sur la pauvreté de l'offre musicale légale en France. En plus de Deezer, Spotify, Qobuz, Jiwa ou Noomiz, voici que débarque à pas feutrés l'Américain Rdio .

Lancé en 2010 en Amérique du Nord, Rdio est la créature du Danois Janus Friis, déjà connu pour avoir fondé Kazaa, la plateforme de peer-to-peer star du milieu des années 2000, puis le logiciel de téléphonie par IP Skype. Deux programmes marquants pensés avec le Suédois Niklas Zennström, qui a soutenu (et financé) la création de Rdio via son fonds d'investissement Atomico. Depuis, le service musical a été rendu disponible au Brésil, en Allemagne, au Danemark, en Espagne et au Portugal, et l'est aussi depuis hier au Royaume-Uni en attendant l'Australie.

Une fois cette genèse plutôt classe racontée, il y a peu à dire sur Rdio, qui fonctionne peu ou prou comme tous les services de streaming musicaux: écoute instantanée, partage facile, playlist à volonté, options sociales, etc. Comme la grande majorité de ses concurrents, Rdio a choisi la formule web-based , c'est-à-dire qu'on y accède depuis un navigateur comme on accède à Deezer. S'y ajoute une application mobile pour smartphones et tablettes.

Côté catalogue, Rdio annonce au dernier pointage 12 millions de titres, avec des accords conclus avec les quatre (bientôt trois) majors et beaucoup des gros indépendants. En face, Spotify a officieusement passé la barre des 17 millions de morceaux (le chiffre de 19 millions avait un temps été publié). Deezer en compte 15 millions. Quant à la guerre des chiffres d'utilisateurs, elle fait rage entre les deux derniers (18 millions annoncés pour Spotify, 22 millions pour Deezer, mais il faut ensuite décompter les «faux» abonnés qui le sont d'office avec un service de téléphonie ou d'Internet sans pour autant écouter régulièrement de la musique, puis faire le tri entre les payants et les gratuits... et ce n'est pas le sujet de cet article).

La seule différence fondamentale entre Rdio et ses deux principaux concurrents en France tient dans son choix de ne pas offrir d'accès gratuit. Seule possibilité pour découvrir la musique via son interface plutôt bien faite et stylée: sept jours d'essai offerts, et la possibilité d'écouter un extrait de 30 secondes pour chaque titre. Sinon, il faudra payer, avec là aussi des prix déjà vus: 4,99 euros pour l'offre classique (accès desktop seulement) et 9,99 euros pour l'offre desktop + mobile.

«Musique pour la meilleure partie de votre journée. Peu importe alors que ce n'est.» Hum... Il va falloir faire un petit effort sur la traduction les gars.

Débarquer sans offre gratuite semble toutefois un pari risqué, tant celle-ci a servi Deezer puis Spotify, qui l'entretiennent savamment et en ont fait un levier efficace pour leurs formules payantes (Spotify annonce un taux de conversion du gratuit au payant de quelque 15%). S'abonner à un service d'écoute n'est pas encore entré dans les habitudes des internautes, même si la débandade du direct download parallèlement à l'arrivée à maturité des offres légales a changé la donne depuis fin 2011. Ah oui, et puis bien sûr grâce à Hadopi aussi (hum).

L'un des enjeux qui va aussi s'imposer rapidement à l'équipe de Rdio, c'est la «territorialisation» de son offre, c'est-à-dire son adaptation à chacun des marchés. En effet, la musique a beau être plus que jamais mondialisée et les catalogues d'un service de streaming être identique à quelques centaines de milliers de titres près pays par pays, la consommation est différente de la France à l'Allemagne, du Canada au Brésil. C'est sûrement là, dans la capacité à faire remonter en page d'accueil un contenu qui répond aux envies des auditeurs du moment tout en étant capable de les surprendre, qu'un service de streaming peut se différencier. Deezer fait déjà cela en France mais peine par exemple à le faire au Nord de l'Europe, ou une seule personne est chargée de gérer les homes de la Norvège, de la Suède, du Danemark et de la Finlande... Balèze, et donc inabouti. Dès lors, Deezer occupe le terrain mais en gagnera difficilement dans beaucoup des 48 pays où il est présent à ce jour.

Tout à ce développement géographique tous azimuts, le Français Deezer avait également laissé le terrain libre au Suédois (et pas mal Londonien aussi) Spotify, qui a occupé l'espace médiatique ces derniers mois en lançant ses applications, puis un player exportable bien foutu, un partenariat mondial avec une marque de sodas à l'étiquette rouge et dernièrement une application pour l'iPad (à peu près 98 ans après la version Android...). Mais Deezer revient en force en annonçant en cette fin de semaine l'ouverture de son API «pour les applications web en

javascript et les applications mobiles iOS et Android» . Désormais, les développeurs vont donc pouvoir s'amuser avec le service de streaming et proposer leurs applications, comme ils l'ont fait avec Spotify .

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