Réseau social : Le Socl très commun de Microsoft

par Camille Gévaudan
publié le 17 novembre 2011 à 16h03
(mis à jour le 17 novembre 2011 à 16h04)

D'abord, un constat : Microsoft est actuellement bien implanté sur le marché des communications en ligne, puisqu'il dispose d'une solide base de 360 millions d'utilisateurs pour sa messagerie Hotmail (première devant Yahoo et Gmail) et «plus de 300 millions» pour Live Messenger (ex-MSN). Vient ensuite l'exposé du problème : ces deux services vieillissent. En 2011, mail et tchats sont en passe de devenir has been . C'est sur Facebook que les jeunes internautes s'envoient désormais messages, photos, liens et vidéos. Arrive alors la question cruciale : comment élargir l'audience de Microsoft pour gagner trafic, clics et fric ? Dans la grande salle de réunion de Microsoft, à Redmond aux États-Unis, le brainstorming a dû faire fumer les cervelles. Et après des heures d'élucubrations, alors que tous les cadres avaient épuisé leurs ressources, un stagiaire a eu cette idée géniale : «Et si on faisait un réseau social ?»

Première mission du plan d'attaque : trouver un nom de code. Ce sera «Tulalip» -- assez mystérieux pour éloigner tout soupçon sur le plan machiavélique de Microsoft, mais secrètement surchargé de sens : les Tulalips sont une tribu d'Indiens d'Amérique. Tribu, réseau social... Non ? D'accord, peut-être qu'on surinterprète un peu.

Déniché cet été par quelques sites d'actualité technologiques, Tulalip promettait en guise de slogan : «Trouvez ce que vous cherchez et partagez ce que vous savez.» C'est là le cœur et la botte secrète du projet : il fallait se démarquer des concurrents Facebook et Google+. L'un bénéficie de sa relative ancienneté (Facebook est né en 2004) et l'autre d'une intégration poussée avec les autres services made in Google -- Gmail, le moteur de recherche, le lecteur de flux RSS... Pour se faire une place au soleil, Microsoft comptera donc sur la recherche. Le réseau Tulalip pourrait ainsi se nourrir de Bing, qui stagne à 3,5% de parts de marché depuis des mois, et gonfler en retour les statistiques du moteur de recherche. Dans le meilleur des scénarios, les deux services se feraient profiter l'un l'autre de leur succès.

Micrsft fait un rseau socl

Novembre 2011 : une première version expérimentale du réseau est prête à l'emploi. Il est temps de la mettre entre les mains d'un groupe restreint d'internautes. À cette occasion, Thomas Houston, rédacteur du site The Verge, réussit à s'infiltrer dans le «beta-test» et à chiper quelques captures d'écrans.

Son compte-rendu commence par constater combien le site (rebaptisé «Socl» entre temps) est visuellement proche des réseaux concurrents :

«La grande barre de recherche en haut du site demande : "Que cherchez-vous ?" et invente ainsi un nouveau type de statut» , quelque peu artificiellement, en écho aux désormais célèbres «À quoi pensez-vous ?» de Facebook et «Que faites-vous ?» de Twitter. Taper des mots dans ce champ lancera automatiquement une recherche Bing, dont les résultats s'afficheront directement dans le réseau social. L'internaute peut alors choisir de mettre à jour son statut pour informer tout le monde qu'il est en train de chercher la «solution niveau 1-8 angry birds ananas d'or caché».

Socl what ?

Ses amis, ravis de l'apprendre, pourront «commenter, "liker" ou taguer ce statut» . En le «taguant», ils enregistrent la recherche en question dans une liste personnelle pour y accéder plus facilement par la suite. Comble de la sophistication, «il est même possible de trier les recherches et les statuts de nos amis selon leur type (web, images, vidéos, actualités...)» .

Tout cela paraît d'un intérêt très limité, mais pas de panique : «il faut noter que que Socl est un projet de recherche. Il est même possible qu'il ne voie jamais le jour en tant que produit fini...» Mais d'après les informations de The Verge, le réseau est tout de même destiné à être testé publiquement dans les temps à venir. Penchons-nous donc sur une autre de ses fonctionnalités originales : les video parties .

«La video party, sortie de nulle part, complète la fonction de tchat en y ajoutant la possibilité de regarder des clips YouTube à plusieurs, en même temps.» Infiniment moins pratique que le bon vieil échange de liens, sur lesquels on peut cliquer quand on en a le temps et l'envie, les video parties imposent donc aux internautes de tous se rendre disponibles au même moment, pour le plaisir de partager une expérience très à la mode, très 2.0, à la fois sociale et en temps réel.

La conclusion de Thomas Houston est aussi rude que sa perplexité devant le site en question : «Socl va devoir faire quelques efforts supplémentaires s'il veut prouver que les internautes ont besoin d'un énième réseau social pour trouver les informations qu'il cherchent. Sans compatibilité mobile ni intégration dans le reste de l'univers Microsoft, il reste à Socl une montagne à gravir.» On gardera un œil distrait sur la suite des événements.

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