Sarkozy a les crocs : la presse est à cran

Docu. «Vampire des médias» se penche sur le malaise des journalistes français face au Président.
par Antoine Guiral
publié le 25 juin 2009 à 6h52
(mis à jour le 25 juin 2009 à 6h52)

Il est un pays frontalier de la Suisse où planerait «une menace sur la liberté de la presse». Autocensure par crainte de représailles, relations incestueuses entre le pouvoir et les dirigeants des grands médias, interventions policières ou judiciaires contre des journalistes, omniprésence du Président sur les écrans… Avec son titre qui donne des frissons (Sarkozy, vampire des médias), l'émission Temps présent de la Télévision suisse romande montre une France médiatique en plein malaise et globalement peu reluisante.

Notons d'abord que le sujet traité ici n'a jamais été abordé par une chaîne de télévision française. Tous les journalistes de télévision interrogés sur leur travail ont pourtant des choses à dire et ne semblent dupes de rien. Patrice Machuret, journaliste à France 3, chargé de la couverture de l'Elysée et auteur d'un livre sur Sarkozy, raconte comment le chef de l'Etat l'a traité de «crétin» et de «honte de la profession». C'était dans un avion, où il n'était pas, lors d'un de ces fameux «off» avec des journalistes. On touche là à toute la perversité du mécanisme des pressions sarkozystes. Prévenu de la teneur des propos présidentiels, Patrice Machuret peut imaginer que ses jours sont comptés…

L'habileté du chef de l'Etat consiste à ne pas agir à chaud. A biaiser aussi. L'humoriste Stéphane Guillon officie toujours sur France Inter. Mais son patron, Jean-Paul Cluzel, a été débarqué à cause de lui, affirme Daniel Schneidermann (Arrêt sur images et Libération). Même chose pour Alain Genestar, de Paris Match, qui avoue dans ce reportage que si c'était à refaire, il ne publierait pas les photos de Cécilia Sarkozy et de son amant.

Pour étendre son influence, le Président, qui connaît tout des affaires internes et des difficultés des rédactions, adore jouer des «divisions et des faiblesses» de la presse, note Jean-Michel Thénard du Canard enchaîné. Finalement, comme le dit Didier Porte, autre humoriste de France Inter, «le sketch devient emblématique de la liberté d'expression». Mais au fait, le sketch, c'est de l'info coco ?

NB : Ce reportage devait être diffusé aujourd'hui sur TV5, mais il n'en sera rien. Pas de censure venue de l'Elysée : la TSR est en négos pour vendre le sujet à une chaîne belge. Il sera programmé plus tard afin de ne pas court-circuiter la diffusion en Belgique, où l'on reçoit TV5.

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