Twitter : laissez ouverte la cage de l’oiseau

par Stéphane Moussie
publié le 6 août 2012 à 16h56
(mis à jour le 6 août 2012 à 18h03)

«Twitter, quel type d'oiseau deviens-tu ? Es-tu toujours le mignon petit oiseau que tout le monde adorait ou deviens-tu un rapace effrayant?» Postée la semaine dernière, une pétition sur le site Change.org prend à partie le réseau de microblogging sur sa politique d'ouverture aux applications tierces.

Baptisée «Twitter : garde ton écosystème ouvert», la pétition est une réponse à des signaux jugés inquiétants envoyés à plusieurs reprises par Twitter. En mars 2011, Ryan Sarver, responsable de l'API de Twitter, publiait ainsi une tribune portant sur l'expérience utilisateur du réseau, dans laquelle il demandait un respect strict des règles des APIs. Sarver remettait notamment en cause l'existence de certains clients (des programmes permettant d'interagir avec Twitter) peu inventifs : «Des développeurs nous demandent s'ils doivent concevoir des clients qui imitent ou reproduisent l'expérience des clients Twitter officiels. La réponse est non.» Et de mettre en avant des applications se démarquant d'une façon ou d'une autre du client officiel et «méritant» ainsi d'exister.

Cette tribune avait fait tiquer les défenseurs de l'ouverture de Twitter, redoutant que l'entreprise ne bloque des applications tierces pour imposer coûte que coûte les siennes. Fin juin, Michael Sippey, chef produit chez Twitter, poste à son tour un billet allant dans ce sens. Il y réaffirme qu'un client tiers qui ne propose pas d'éléments le différenciant du client officiel n'est pas souhaitable. Le site américain The Verge enfonce le clou quelques jours plus tard en déclarant, sur la base d'indiscrétions, que des changements majeurs allaient intervenir sur le réseau de microblogging dans les prochains mois.

Twitter prendrait, selon ces informations, la direction d’un écosystème fermé, à la manière de Facebook. Le nerf de la guerre serait, comme souvent, la monétisation du service. Une monétisation qui passe par l’ajout de publicités, qui -- pour être rentables -- doivent faire passer les utilisateurs par un nombre limité de portes d’entrées. En somme, Twitter pourrait ne pas vouloir s’embarrasser d’applications tierces susceptibles de mettre à mal l’affichage de nouvelles sources de revenues.

De quoi remettre en cause le statut de «plateforme ouverte» que le réseau s’attribue lui-même. Si les développeurs trouvent à redire de cette possible fermeture -- susceptible de rendre inutile leur produit basé sur Twitter --, l'attitude des utilisateurs sera tout aussi importante dans ce dossier. Selon Ryan Sarver, 90% des utilisateurs actifs de Twitter utilisent une application officielle au moins une fois par mois.

Twitter avait racheté le client TweetDeck en 2011.

D'après un développeur britannique qui s'est basé sur l'analyse d'un million de tweets (un chiffre qui reste minuscule comparé aux centaines de millions de tweets qui circulent chaque jour, mais tout de même significatif), les clients officiels sont de loin les plus utilisés par les internautes. En première place arrive le site web, avec à lui seul quasiment un quart des tweets envoyés, puis les applications mobiles officielles sur iOS, Android et BlackBerry. UberSocial pour BlackBerry, une application de tierce partie, vient boucler le top cinq.

Au total, près de 71% des tweets sont donc envoyés avec des outils développés par l'entreprise de San Francisco. Une assise encore confortée par l'acquisition des clients alternatifs les plus populaires comme Tweetie sur Mac (qui est devenue l'application officielle sur ce système d'exploitation après un changement de nom) et TweetDeck, acheté en mai 2011.

Une ultradomination qui inquiète les développeurs d'applications, qui craignent que Twitter leur ferme carrément la porte. D'où la pétition initiée par Nova Spivack, un entrepeneur américain qui a fondé Bottlenose , un moteur qui permet d'effectuer des recherches sur plusieurs réseaux sociaux... dont Twitter. Ce dont il ne fait aucunement mention dans l'appel qu'il a lancé.

La pétition, qui a recueilli seulement 227 signatures à l’heure actuelle, exprime trois requêtes:

- «Tenir la promesse d'être une plateforme ouverte» , en laissant à disposition des APIs utilisables sans des restrictions trop stricts ;

_ - «Clarifiez vos intentions pour la communauté des développeurs le plus rapidement possible» , autrement dit faire preuve de transparence envers les bâtisseurs indépendants de l'écosystème ;

_ - «Respectez et soutenez l'énorme écosystème autour de votre entreprise et de votre produit» .

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique

Les plus lus