Un loup autour de la maison Copé

par Raphaël GARRIGOS et Isabelle ROBERTS
publié le 3 avril 2008 à 2h58

«Et si on partageait nos idées ?» C'est par cette guillerette invite que Jean-François Copé incite les internautes à participer au site (1) lancé hier par la commission chargée de réfléchir à la télévision publique. Mais en vrai, la commission Copé aimerait bien que certaines personnes partagent un peu moins leurs idées sur la télé publique. Surtout celles d'un certain Frédéric Lefebvre, député UMP proche de Nicolas Sarkozy, accusé de faire une commission bis dans le dos de l'officielle.

Oukase. Petit résumé. Le 8 janvier, un certain Nicolas S. balance une bombinette : il va supprimer la publicité sur la télé publique. Stupeur. Aussitôt, France Télévisions est à feu et à sang, et les différents ministères rament pour assurer le service après-vente de l'intempestive annonce présidentielle. Une grève historique de la télé publique et moult cafouillages plus tard , le 19 février, l'Elysée met en place une commission destinée à mettre en musique l'oukase sarkozyen. Et là, c'est le drame : Frédéric Lefebvre n'est pas de la commission. Alors qu'il anime un distingué «Club parlementaire sur l'avenir de l'audiovisuel» (CPAA), gentille officine invitant à dîner régulièrement le gratin des médias. L'occasion, pour les nombreux députés membres de ce club de s'offrir aux lobbyistes de TF1, Canal + ou Endemol, pour ne citer que quelques «partenaires» du CPAA.

Evincé de la commission Copé, Frédéric Lefebvre ne s'en tient pas là. L'éventualité, avancée par Sarkozy, de ne supprimer la pub sur France Télévisions qu'après 20 heures ? C'est une idée de Lefebvre. Et à la mi-mars, il lance, au sein du CPAA, des ateliers «afin d'apporter sa contribution active et d'enrichir les travaux en cours de la commission Copé». Dans ces ateliers, des personnalités de la publicité, de la production, de TF1. «Je ne vais pas lui interdire de réfléchir, plaide Jean-François Copé. Il faut être open et arrêter de chercher le complot partout.»

Mais depuis plusieurs semaines, la moutarde Lefebvre monte au nez de plusieurs membres de la commission Copé, certains ayant la nette impression de servir de potiches pendant qu'au sein de la commission Lefebvre se prendraient les vraies décisions. «Elucubrations, balaie Lefebvre, il n'y a pas de commission bis, on est parfaitement coordonnés.» Pourtant, hier, selon les dires d'un de ses membres, la commission Copé était même «au bord de l'explosion». La raison ?

Un article du Figaro affirmant que la commission Copé a arrêté un schéma pour la suppression de la pub : fin des réclames uniquement entre 18 et 21 heures. Aussitôt Copé se fend d'un ferme démenti jugeant «particulièrement choquant [.] de laisser entendre que les décisions ont d'ores et déjà été prises». Au sein de la commission, on y voit une manipulation signée. Frédéric Lefebvre. Lequel, évidemment, dément.

«Scénarios». Supprimer la pub entre 18 et 21 heures ? «N'importe quoi, indique-t-on au ministère de la Culture. Ça ne fait pas partie des scénarios.» Délaissant la suppression totale de la pub, la commission Copé s'oriente en fait vers une interdiction après 20 heures, certains plaidant pour 21 heures. Pratique : la compensation à verser à France Télévisions serait bien moins élevée. Et la réforme décidée par Sarkozy nettement moins spectaculaire aussi.

(1) www.matelepublique.fr

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