«Mettre en appétit, donner envie de découvrir des films»

David Honnorat, du site Vodkaster, nous en dit plus sur cette plateforme cinéphile 2.0.
par Alexandre Hervaud
publié le 29 septembre 2009 à 12h46

David Honnorat occupe officiellement le poste de Directeur Produit et Communauté à Vodkaster . En vérité, il passe évidemment son temps à voir des films en salles et en DVD. Il revient pour nous sur l'origine du projet, son fonctionnement, ses objectifs, ses projets...

Le concept de Vodkaster, c'est quoi ? Pouvez-vous revenir un peu sur la genèse du projet ? 

On a tous en nous des meilleurs moments de cinéma qu'on a envie de partager, des souvenirs de scènes à vérifier, des répliques cultes qu'on voudrait se passer en boucle… Vodkaster apporte enfin une vraie solution à ces besoins, en offrant cette promesse inédite : l'accès gratuit et instantané à n'importe quelle scène, dans n'importe quel film.

Autour de ces milliers de scènes de films, on va bâtir des applications à la fois fun et érudites qui donnent "soif de cinéma" et permettent de démocratiser la cinéphilie.

Vodkaster propose donc la toute première base mondiale sur les scènes de films. Et pour enrichir cette base, nous avons fait le choix de rendre le site totalement collaboratif : non seulement l'indexation des extraits avec l'ajout de tags, mais aussi directement à la source, en permettant à tout internaute de publier très simplement une nouvelle scène sélectionnée n'importe où dans un film, un peu comme initier une nouvelle définition dans Wikipedia.

Pour la petite histoire, l'idée est partie il y a 18 mois d'un petit jeu entre nous, une sorte de blind-test ciné avec des shots de vodka à la clef, c'est en partie de là qu'est venu le nom. Comme nous avions des compétences très complémentaires -- les ayants droit du cinéma, l’ingénierie de services en ligne type VoD, et le web communautaire-- et une passion commune pour le cinéma, on a commencé à creuser le concept, à donner corps au projet, à le développer, à le financer.

Le principe de saucissonner des films, d'extraire des scènes hors de leur contexte, le tout sur un écran d'ordinateur dans une qualité forcément pas optimale... des cinéphiles ont engagé des tueurs à gage pour moins que ça, vous ne pensez pas que ça désacralise totalement l'expérience cinématographique, même en 2009 ? 

Personnellement je vais beaucoup voir les films en salle, j'en vois 4-5 par semaine et clairement je pense que c'est là, dans l'idéal, que les films doivent être vus. Donc les tueurs à gage seraient gentils de m'épargner.

Ensuite, Vodkaster n'est pas un substitut au cinéma, bien au contraire, le but est de mettre en appétit, de donner envie de découvrir des films. D'ailleurs c'est précisément la vocation de Vodkaster de "ré-inscrire" toutes ces scènes dans leur contexte cinématographique, et d'apporter la qualité technique ( streaming HD, sous-titres,...), l'information cinéphile et la mise en valeur des œuvres, ce que YouTube ou Dailymotion sont incapables de fournir. Certains nous ont d'ailleurs défini comme la première «encyclopédie multimédia du cinéma» .

Exemple de l'extraction d'une scène de Requiem for a Dream - DR

Vous avez pris le pari d'ouvrir un blog assez fourni et régulièrement alimenté avant la mise en route du projet en lui même. Un petit bilan sur cette expérience ? 

Avec le recul, je pense que, dans notre cas, c'était un très bon choix. Le but de ce blog était double : d'une part parler de ce qu'allait être Vodkaster, une approche du cinéma vraiment adaptée aux pratiques actuelles du web et, d'autre part, commencer à tisser des liens avec les communautés de blogueurs et d'amateurs de cinéma qui, on l'espère, seront actifs sur Vodkaster.

Actuellement sur le site, on trouve plus de 200 films dans lesquels l'internaute peut «piocher» des extraits. Les conditions sont limitées (pas plus de 3 minutes d'extraits, pour l'instant pas exportables...), comment se sont passées les discussions avec les ayants droit, et y-a-t-il des assouplissements en vue ?

Vodkaster a fait le choix de se positionner comme un véritable partenaire des ayants droit, en signant des accords qui garantissent la qualité des contenus et des vidéos, mais aussi la pérennité du site. La naissance de Vodkaster résulte d'un mariage d'amour consenti entre deux univers qui ont souvent du mal à se comprendre : le cinéma et le web. Quatre ans après l'émergence de la VoD payante, Vodkaster devient ainsi une des (trop) rares initiatives françaises à proposer un véritable nouveau modèle légal de valorisation du cinéma à l'heure du Web 2.0...

Le limitation des extraits à 3 minutes nous est imposée pour garantir l'aspect promotionnel du site. Mais comme on peut sélectionner et voir absolument n'importe quel extrait du film, cette limitation est beaucoup moins douloureuse qu'il n'y paraît. De plus, on constate qu'au-delà de 3 minutes ça commence à faire long pour une vidéo sur le web.

Quant à l'export des vidéos, ce sera bientôt possible pour les extraits très courts que nous appelons les "Movie Shots" : une réplique, un gag, tout ce qui dure moins de 30 secondes. Nous développons actuellement des outils qui permettront par exemple de donner son humeur du jour avec un extrait sur Facebook, ou d'envoyer des répliques bien senties à ses amis…

Concernant notre catalogue enfin, nous avons à ce jour signé plus de 800 titres, et beaucoup de deals devraient se débloquer avec l'ouverture du site. Globalement, le projet a été très bien accueilli par les ayants droit, car il fait "exister" les films sur Internet avec une logique virale, sans pour autant "cannibaliser" les exploitations traditionnelles (Salles, DVD, VoD, TV,...). Mais, notre approche étant totalement nouvelle, nous travaillons encore à améliorer le cadre juridique, avec la perspective de passer la durée à 4,5 voire, soyons fous, 6 minutes...

Vous avez visiblement un partenariat avec Amazon pour acheter les films en DVD. Vu le nom du site, un partenariat avec des services de VoD aurait pas été plus cohérent ? C'est envisagé ? 

Pour le moment il s'agit d'un partenariat d'affiliation très basique avec Amazon. Mais notre modèle est naturellement de faire la promotion des films sur tous ses modes d'exploitations, le DVD, la télévision et donc bien sûr la VoD.

A terme et dans l'idéal, c'est quoi le modèle économique auquel aspire Vodkaster ?

Le cinéma présente l'avantage d'être un contenu de qualité très attractif pour les annonceurs. Le succès d'un site comme Allociné, dont le modèle économique repose quasi-exclusivement sur la publicité, nous permet de croire en ce modèle. De plus, derrière tout extrait il y a un DVD, une VoD : nous percevons des commissions pour toutes les transactions que nous aurons initiées.

Toutefois, et nos investisseurs nous y ont encouragé, nous avons fait en sorte de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier. La publicité ne constitue donc que la moitié de notre modèle économique, nous développons par ailleurs des services d'entreprise à entreprise pour les professionnels, ainsi qu'une offre spécialement adaptée aux enseignants et aux organismes de formation.

Dans votre catalogue de film, on parle de l'arrivée prochaine du distributeur Bach Films , et les amateurs de série Z en bavent déjà. D'autres joyeusetés en perspective ? Quelles sont les prochaines étapes marquantes à venir pour le site ?

Il nous faut un peu de temps pour rendre tout notre catalogue disponible en ligne, d'autant qu'il s'enrichit chaque jour de nouveaux titres signés. Au rayon des curiosités on va par exemple ajouter dans les prochains jours quelques films de sexploitation des années 60-70 hasard, on vous en parlait il y a peu [ici , ndlr]

Quant aux grandes étapes à venir on peut citer de nouvelles applications ludiques, l'intégration d'un jeu type blind-test vidéo, l'ajout de fonctions sociales (type friending , recommandations…), la fonction d'export des "movie shots" et bien d'autres encore…

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