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Libération

«Utiliser Google implique des contreparties»

par Erwan Cario
publié le 13 mars 2012 à 12h30

Olivier Laurelli, alias Bluetouff, est blogueur, cofondateur du webzine Reflets.info et spécialiste en réseaux et sécurité informatique au sein de Bearstech. Il s'est ému sur son blog Bluetouff.com de la naïveté de certains utilisateurs de Google.

Pourquoi si peu d’internautes se soucient des informations que Google récupère ?

Tout est fait pour. Le génie de Google, c’est la richesse des services qu’il propose. Google est capable de connaître les déplacements d’une personne qui va utiliser un téléphone sous Android, le modèle précis de l’appareil photo qu’elle utilise pour ses photos sur Picasa, ou encore l’ensemble des sites visités sur une période donnée, donc, en temps d’élections, ses opinions politiques. Mais ces services fonctionnent très bien, et il y a une cohérence à les utiliser ensemble. Pourquoi s’embêter à lire les conditions d’utilisation ?

On voit bien qu’il y a un truc flippant, mais quel est le danger pour les internautes ?

Le danger n’est pas palpable. Google est une entreprise qui a toujours respecté certains principes, comme celui de la neutralité des réseaux. Et Google respecte pour l’instant ses utilisateurs, malgré quelques débordements de ses dirigeants. Le problème risque de se poser en cas de changement, dans la direction par exemple. Et déjà, Google est sans doute la première agence de renseignement non gouvernementale. Toutes les polices du monde y font un jour appel pour une demande d’identification d’un internaute.

C’est difficile d’expliquer aux internautes de faire attention, voire de cesser d’utiliser un service qui est si central pour eux…

Pour Facebook, je suis d’avis qu’il faudrait appeler à un boycott franc et massif, mais je ne recommanderai jamais de cesser d’utiliser Google. Par contre, les utilisateurs devraient être conscients qu’utiliser Google implique des contreparties gênantes.

C’est la célèbre phrase : «Si vous ne payez pas, vous n’êtes pas le consommateur, vous êtes le produit en train d’être vendu.»

Je préfère la citation de Homer Simpson : «Et ça coûte combien, votre truc gratuit ?» Ici, ça coûte vos données personnelles.

Et donc, est-ce «rentable» de se protéger de cette collecte ?

C’est très complexe… On aura du mal à expliquer à un utilisateur isolé la «rentabilité» qu’il a à se protéger. En revanche, à l’échelle d’une nation… Exemple : la recherche vocale sur Android, il faut savoir que le traitement des commandes ne se fait pas sur le téléphone, mais sur un serveur distant. Donc, potentiellement, Google a une empreinte biométrique de ses utilisateurs ! Le jour où on se retrouvera avec des cartes d’identités Google ou Facebook, certains commenceront à comprendre les dérives envisageables.

Paru dans Libération du 12 mars 2012

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