Vie privée : Facebook se prend un mur à Berlin

par Alexandre Hervaud
publié le 12 avril 2010 à 16h14

La semaine dernière, on évoquait ici les derniers projets de Facebook en matière «de partage à des sites extérieurs» des données personnelles de ses 450 millions de membres. Une opération encore au stade de projet et qui serait, dixit Facebook, censée améliorer l'expérience des utilisateurs sur «une poignée de sites partenaires» liés par contrat. Le tout avec la possibilité de se déconnecter des sites en question et d'effacer ses traces, mais cette option n'est bien sûr pas celle proposée en premier lieu, puisque la connexion sera automatique. Malgré un certain écho dans les médias, la nouvelle n'a pas vraiment déclenché de levées de boucliers en France. On ne peut pas en dire autant de nos voisins allemands .

La puissante organisation Vzbv (on passe direct en VF, qui donne Fédération Allemande des Organisations des Consommateurs) a ainsi fait savoir son mécontentement . Pour eux, les utilisateurs n'ont pas à accepter de telles modifications, et devraient abandonner le service pour peu qu'ils tiennent au respect de leur vie privée. L'association s'est vu adoubée par la ministre Ilse Aigner en charge des questions de consommation. Dans une lettre ouverte destinée à Mark Zuckerberg , la femme politique a déclaré : «j'attends de Facebook une révision d'urgence de sa politique de confidentialité.» D'autres représentants politiques, de divers partis, ont également nourri le débat, sans forcément appeler au boycott, mais en alertant la vigilance des internautes sur la stratégie du réseau social. Le parti des Verts a ainsi créé un groupe Facebook intitulé Privacy Control – NOW! qui, à l'heure actuelle, ne regroupe que 770 fans. Sachant que l'Allemagne compte plus de 5 millions d'utilisateurs, c'est ein Groß bide.

Facebook a répondu aux doléances de la ministre Aigner par la voix de Richard Allan, responsable de la politique publique de l'entreprise en Europe depuis juin 2009. Il a rejeté les allégations de la ministre, qui de son côté a invité les dirigeants de Facebook en Allemagne. En France, on n'a pas encore entendu sur le sujet l'UFC-Que Choisir, membre aux côtés de la Vzbv du BEUC (Bureau Européen des Unions de Consommateurs). L'organisation française surveille pourtant de près ce genre de couacs, puisqu'elle s'était ému, en mars , de la décision du site pagesblanches.fr d'afficher le profil Facebook des abonnés. Un service jugé alors par l'UFC «peu efficace et inquiétant» (mais modifiable en se rendant sur cette page) , d'autant qu'il intervenait peu après le rachat du site 123people , un aspirateur à données personnelles disséminées sur la Toile, que le blogueur Soymalau avait joliment démonté dans un billet rageur .

Outre-Atlantique, le réseau social fait principalement parler de lui dans les médias ces derniers jours pour deux affaires. L'une, plutôt insolite, concerne un ado de 16 ans qui a porté plainte contre sa mère pour harcèlement, suite au piratage de son compte Facebook . L'autre, beaucoup moins drôle, traite d'un cas de cyberbullying sur Facebook (concept explicité par Emmanuel «Haute dèf'» Chain sur TF1 il y a peu) ayant entraîné le suicide d'une ado . La justice US a condamné le manque de coopération de Facebook dans l'affaire, mais le réseau social se serait en réalité juste contenté d'appliquer la loi, sans faire de zèle, comme le relate Slate.com . Une retenue dans la divulgation d'information qui sera, on l'espère, également de mise pour le partage de données dans un cadre commercial.

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