iPhone : la politique sans queue ni téton d'Apple

Apple a une fois de plus rejeté une application jugée «pornographique», bien que soft. Une affaire qui met à jour l'incohérence du système d'approbation de l'Appstore.
par Alexandre Hervaud
publié le 29 juin 2009 à 15h25

Sans forcément exciter tous les érotomanes nerds du globe, l'arrivée officielle sur l'iPhone d'une application «coquine» --bien que soft-- n'était pas passée inaperçue. Baptisée Hottest Girls et vendue 1,99$ (1,40€), l'application a priori créée par un certain Allen the geek n'aura pas fait long feu. Quelques heures à peine après sa mise en ligne, Apple a retiré l'application olé olé. Si dans un premier temps, le créateur a tenté de minimiser la chose, arguant que suite à une trop forte demande, Hottest Girls n'était plus disponible et reviendrait bientôt, la firme de Cupertino a clairement assumé son retrait. La firme a ainsi déclaré à CNN : «Apple ne distribuera pas d'application offrant du contenu inapproprié, comme de la pornographie» .

Capture d'Hottest Girls - DR

«Pornographique» , Hottestgirls ? Autant considérer les pages charme de FHM comme le summum du trash, alors, car devant les images proposées par l'application, force est d'admettre que la nudité affichée versait plus dans la suggestion que dans l'étalage pervers de chair. Le plus étrange dans cette affaire ne réside pas dans la suppression de l'application en elle-même, mais dans la cacaphonie qui règne du côté de l'AppStore et de sa gestion. Techcrunch va jusqu'à s'interroger : «Y'a-t-il vraiment un responsable de l'AppStore ?» . Trent Reznor, leader de Nine Inch Nails, s'était posé sensiblement la même question après la censure de l'application iPhone consacrée à son groupe . «Apple, repensez entièrement votre politique et , bordel, faites quelque chose à propos de votre système d'approbation.» , avait même déclaré Reznor en mai dernier.

Ce qui peut surprendre, de la part d'Apple vis à vis d'Hottest Girls, c'est que l'application avait clairement été indexée dans la catégorie «réservée aux + de 17 ans». Une distinction faite par Apple, qui savait donc à quoi s'attendre avec Hottest Girls, d'autant que via le nouveau système d'exploitation récemment lancé, un système de contrôle parental renforcé a été mis en place. Les parents peuvent ainsi limiter à leurs bambins l'accès à certaines applications en restreignant l'accès par tranche d'âge : 4 ans, 9 ans, 12 ans, 17 ans... A partir de là, même si la fiabilité du système, forcément contournable, reste à prouver, on ne voit guère ce qui dérange Apple dans l'application Hottest Girls, d'autant que bon nombre d'applications similaires sont acceptées. Une simple recherche avec le mot clé «hot» dans l'Appstore nous promet de bons moments de rinçage d'œil : Sexy Bikini, Hot Girls, Sexy Ladies, Hot Weather Girl...

Hottest Girls n'est pas la première application coquine à subir les foudres d'Apple. On se rappelle encore du pas très fin – mais si classe – iBoobs qui exploitait à fond son joli nom. Pas du genre à encourager de près comme de loin le piratage, principal ennemi de son iTunes, Apple s'est aussi illustré dans le refus d'applications ayant rapport avec la technologie Bittorent. Drivetrain devait ainsi permettre de gérer à distance les téléchargements en cours sur votre ordinateur via l'iPhone. Utile et pratique, sans doute trop pour Apple qui l'a refusé, sous prétexte que ce type d'application encourageait l'infraction aux droits d'auteurs. Plus absurde encore, l'interdiction --temporaire, suite à la bronca des utilisateurs en mai dernier-- de l'application Eucalyptus , un simple reader d'ebooks qui avait été rejeté...car il proposait la lecture des ouvrages libres de droit mis à disposition par le projet Gutenberg, dont le Kama-Sutra.

La semaine dernière, une étude relativisait par ailleurs le succès de l'Appstore, certes réel en terme de chiffres, mais à nuancer quant à l'usage réel (un peu comme pour Twitter ). Ainsi, comme le rappelle l'AFP , seulement 116 applications, soit 5% du total disponible, étaient utilisées par plus de 100.000 personnes en mai. Pour l'agence AdMob, qui a étudié plus de 2300 applications utilisées par plus de 15 millions de membres, plus de la moitié des applications (1244, soit 54%) comptaient moins de mille utilisateurs. Si les cartons souvent médiatisés d'applications créés par des amateurs veinards sont donc bien réels, les heureux élus ne sont pas légion. Une certaine lassitude des utilisateurs d'iPhone, toujours prompt à abandonner une application deux jours après l'avoir téléchargé, a également été soulignée. Pour palier ce relatif désintérêt, Apple serait peut-être inspiré de miser sur une valeur sûre dont le succès n'a jamais été démenti depuis l'avènement de l'homo sapiens il y a 200 000 ans : le cul.

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