Pièges à sons à la Maison des Métallos

par Marie Lechner
publié le 4 décembre 2010 à 10h52

Déambuler dans ce cabinet de curiosités feutré, c'est comme entrer dans un livre de Jules Verne peuplé de machines extraordinaires. «Orgue à flacons» qui libère ses effluves sonores lorsqu'on retire le bouchon, «Cage de Fa Ré Do» dont les barreaux égrènent leurs notes lorsqu'on les effleure, ou «Madone Theremin», statue qui émet une musique étrange lorsqu'on meut ses mains autour d'elle. Un clin d'œil à l'ancêtre des instruments électroniques qu'on joue sans y toucher et qui produit des sonorités miraculeuses que la presse d'alors qualifiait de «voix des anges, musique céleste» .

Les mécaniques poétiques, dix installations interactives conçues par Yann Nguema, bassiste du groupe electro tourangeau EZ3kiel, sont des objets fantasmagoriques combinant machines surannées et high-tech, bois patiné et écran tactile, emblématique de cette tension contemporaine entre mélancolie pour un temps révolu et fascination pour la magie technologique. Elles sont présentées en ce moment à Paris, à la Maison des Métallos, dans le cadre de Digitalement vôtre , en compagnie des objets musicaux non identifiés de Patrice Moullet, «Percuphone», «Stretchmachine» et autre soucoupe volante multicolore dont on déclenche les sons en tapotant ses carreaux émaillés.

La manifestation consacrée au numérique s'adresse à tous les publics, depuis les mamies octogénaires qu'on initie à Internet aux élèves handicapés impliqués dans un projet de spectacle musical. Ce rendez-vous est aussi l'occasion de faire le point sur les «révolutions» à venir, comme le fameux Internet des objets, qui s'apprête à bondir hors de l'écran pour envahir l'espace physique via des myriades d'objets communicants interconnectés. Mercredi, celui-ci faisait l'objet de conférences et ateliers animés par le think tank Council, servant une rhétorique qui n'évolue guère depuis cinq ans. Le but affiché, rendre désirable cette informatique ubiquiste annoncée comme inévitable et que beaucoup considèrent d'un mauvais œil. «Nous n'avons pas d'autre choix que d'y aller, il faut des scénarios positifs pour vaincre cette peur» , martèle son fondateur, Rob van Kranenburg, qui estime qu'il faut «libérer les données» et ne pas rester accroché à notre conception archaïque de la vie privée, au risque de se faire doubler par la Chine.

L’Internet des objets, poussé par l’industrie et les télécoms, pâtit surtout d’un manque d’idées et compte sur les artistes et hackers pour trouver de nouveaux usages et les fournir en visions créatives. Telle cette délicieuse danseuse d’Albertine Meunier, qui tournoie à chaque fois que le mot «ange» passe sur Twitter, manière de donner une présence sensible au réseau ; ou ces QR codes, code barres pixelisés qu’on peut lire à l’aide d’un smartphone, détournés par l’artiste Olga Kisseleva.

A découvrir également ce samedi (à 21 heures) un autre détournement, de jouets musicaux cette fois, avec Computer Truck, l’as du court-circuitage electro aux côtés de Rubin Steiner et des remixeurs Addictive TV :

Digitalement vôtre à la Maison des Métallos, 94, rue Jean-Pierre-Timbaud, 75011. Jusqu'au 8 décembre. Rens. : www.maisondesmetallos.org

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