Quand Google se fait gardien de la neutralité

par Astrid GIRARDEAU
publié le 16 juin 2008 à 18h45
(mis à jour le 16 juin 2008 à 20h43)

«Si les fournisseurs d'accès ne veulent pas dire ce qui se passe exactement sur les réseaux, on va donner aux utilisateurs les moyens de le savoir» , a indiqué Richard Whitt, conseiller chez Google à The Register . Jeudi dernier, lors du forum Innovation 08 Net Neutrality à Santa Clara (Etats-Unis), il a en effet annoncé le développement d'outils qui permettront aux internautes de vérifier par eux-même si leur fournisseur d'accès à Internet (FAI) intervient d'une manière ou d'une autre sur leur connexion. Il n'a pas donné d'autres détails, ni précisé la date de lancement.

Il a indiqué par ailleurs que Google souhaitait jouer un rôle plus actif dans le débat sur la neutralité du net (auquel il préfère le terme de «neutralité de la bande passante» ), un concept d'égalité de traitement des contenus et protocoles par les opérateurs et fournisseurs d'accès à Internet (FAI), abordé ici dans une dimension plus commerciale que philosophique. Propriétaire de nombreux sites et applications, mais sans contrôle des tuyaux, Google a en effet intérêt à ce que tout -- à commencer par YouTube, particulièrement gourmand en bande passante -- soit traité de la même manière.

Le débat fait actuellement rage aux Etats-Unis , et si Whitt n'a pas cité «Comcast», accusé en 2007 du filtrage des fichiers utilisant le protocole BitTorrent, le nom du premier câblo-opérateur américain était présent dans tous les esprits. Le 3 juin, Comcast, a annoncé faire des tests sur la gestion de sa bande passante pendant les périodes de pointe. Le principe : pendant ces périodes, les gros consommateurs, «ceux qui font par exemple beaucoup de transferts de gros fichiers (le détail est encore flou, ndlr), pourront avoir des temps de réponse plus longs, le temps que la période de congestion du réseau se termine.» La même semaine, Times Warner Cable a réintroduit

la facturation de la bande passante. Ils testent à Beaumont, au Texas, une grille de tarifs, basée sur l'utilisation de la bande passante. Soit 54,90 dollars (35,50 euros) par mois pour 40 Go à 15 Mb/s.

Une intervention régulatrice qui ne plait guère aux affaires du géant de Mountain View. «Nous avons pris pour acquis le fait que l'on pouvait innover sur les réseaux sans l'autorisation de quiconque -- aucune entreprise de bande passante, ni aucun autre gardien de réseau n'a essayé de nous dire quoi faire raconte Richard Whitt. On pouvait amener l'innovation directement aux utilisateurs et les laisser décider exactement ce dont ils voulaient et ce dont ils ne voulaient pas.»

Au forum, étaient également présents Richard Bennett et George Ou , défenseurs de la régulation des réseaux. «Si vous interdisez l'établissement de priorités, vous allez interdire les réseaux convergents. Et si vous interdisez les réseaux convergents, vous obtenez un tas de petits réseaux qui sont conçus pour faire des choses très spécifiques. Pourquoi ne pas les fusionner en un gros tuyaux et laisser le consommateur choisir ce qu'il veut à terme?» a lancé Richard Bennett. Dans la même lignée, George Ou a indiqué : «la neutralité du net empêche le consommateur d'avoir le choix. Le consommateur ne peut pas dire "S'il vous plait, donnez une priorité"» , avant de s'en prendre au rôle de chevalier blanc de la transparence avancé par Google : «la seule société américaine sur ce plateau qui fait de mauvaises choses et qui les cache aux gens est Google. Ils filtrent les contenus en Chine» .

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