Il est «intelligent» , il nous «voit» , il nous «reconnaît» , il nous «comprend» , il «partage ce qu'on a sur le cœur» , et il «imite la chaleur et la beauté de la nature» . Bref, ce n'est pas encore un être humain, mais ce n'est déjà plus un téléphone. Cet appareil-là tente de faire oublier qu'il est qu'un tas de composants électroniques joliment enveloppé dans une coque plastifiée et se fantasme une nature «organique» : sa conception aurait été «inspirée par l'eau, le vent, les feuilles et les galets» .
Mais qu'ont-ils donc fumé, chez Samsung ? Les tirades et slogans qui ont ponctué hier leur grande conférence de presse, organisée à Londres pour la présentation du nouveau smartphone Galaxy S III, ont flirté toute la soirée avec le ridicule... sans doute pour rivaliser avec les célèbres keynotes d'Apple, truffées de wonderful , amazing , incredible , unbelievable , qui émoustillent journaux et sites d'actualité technologique à chaque nouvelle sortie de produit. L'événement est d'importance, car le Galaxy S III aura la lourde tâche de reprendre le flambeau du Galaxy S II, véritable succès commercial (plus de 20 millions d'exemplaires écoulés ) et aujourd'hui considéré comme le meilleur téléphone sous Android. Le dernier-né du constructeur sud-coréen devrait établir les standards du smartphone haut-de-gamme pour les prochains mois.
La première publicité présente sous forme métaphorique quelques unes des nouvelles fonctionnalités du benjamin de la gamme Samsung. Il faut le savoir pour le comprendre, et il est loin d'être sûr que le grand public saisisse toutes ces références en voyant passer ce clip complètement allumé à la télé.
«Il vous comprend» fait ainsi référence à la reconnaissance vocale «S Voice», qui ne devrait plus rien avoir à envier à l'application Siri d'Apple : le Galaxy S3 est entièrement contrôlable à la voix, se réveille quand on le salue, donne la météo ou lance l'appareil photo sur demande, cale des rendez-vous dans l'agenda... Le tout en huit langues, dont l'anglais, le coréen, l'italien, l'espagnol... et le français.
«Il vous reconnaît» est sans doute une façon d'évoquer son détecteur de visage, «Smart Stay», qui analyse en permanence ce qui se passe devant l'écran du téléphone via sa caméra frontale. Le S3 peut ainsi reconnaître le visage de son propriétaire pour déverrouiller son mode «veille» (une fonction introduite dans la dernière version d'Android, Ice Cream Sandwich, et détournable avec une simple photo ), mais aussi et surtout savoir si l'humain qui lui fait face regarde l'écran ou détourne la tête, s'il a les yeux ouverts ou fermés. Pour économiser sa batterie, il se met donc automatiquement en veille lorsqu'il n'accroche plus de regard. A l'inverse, il n'éteint pas l'écran ni ne baisse sa luminosité, même après plusieurs minutes d'inactivité, lorsque les yeux de l'utilisateur restent braqués sur lui -- par exemple quand il regarde une vidéo ou lit un long texte.
Une poignée d'autres fonctionnalités sont également conçues pour donner l'impression de «prédire nos intentions» , de lire dans les pensées de l'utilisateur. «Si l'on écrit un texto à un ami et qu'on décide finalement de l'appeler pour aller plus vite, il suffit de porter le téléphone à son oreille» et il prendra l'initiative de l'appel vocal.
En gros, c'est un téléphone qui «voit, entend et comprend nos besoins» , qui «nous écoute comme un ami proche et nous répond sur-le-champ» , qui «nous fait savoir qu'il est là quand on a besoin de lui» . Un téléphone «pensé pour les humains» -- contrairement à tous ses concurrents, qui sont sans doute pensés pour les canards. Ou les moutons, d'ailleurs, comme semble le suggérer la petite pique qui clôt le teaser du Galaxy S3 (tout aussi grandiloquent que la publicité officielle).
Côté technique, la bestiole dispose toujours d'un appareil photo 8 mégapixels mais s'enrichit d'un mode rafale pour prendre 3,3 clichés par seconde. Poursuivant la folie des grandeurs qui caractérise les téléphones Samsung, il dépasse tous ses prédécesseurs avec un écran HD de 4,8 pouces de diagonale (+22% par rapport au modèle précédent, mais une «marge» réduite autour de l'écran pour limiter la croissance physique de l'appareil). Il embarque, pour ceux à qui cela parle, un processeur quadri-cœur maison Exynos 4412 cadencé à 1,4 GHz.
Un peu gadget mais faisant toujours son petit effet, un chargeur sans fil sera vendu dans les accessoires officiels du téléphone.
Il sortira officiellement à la fin du mois avec une connectivité 3G+, d'abord en Europe puis sur les autres continents, et dans 145 pays au total. La version 4G suivra cet été. Comme l'iPhone, il sera disponible en plusieurs modèles et à différents tarifs selon la capacités de sa mémoire interne (extensible avec une carte micro-SD) : 16 Go, 32 Go et 64 Go -- le moins cher étant vendu «nu» à 649 euros.