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Libération

La neutralité du net bientôt sabordée au Royaume Uni ?

par François Arias
publié le 19 novembre 2010 à 17h21
(mis à jour le 19 novembre 2010 à 17h28)

La neutralité du net continue a faire débat, mais cette fois outre-Manche. À l'occasion d'une conférence de professionnels des télécoms, Ed Vaizey, le ministre de la Culture, a défini la position du gouvernement en s'attaquant franchement au concept-même de neutralité.

Après avoir résumé les débats ayant lieu un peu partout dans le monde , il a défendu la nouvelle vision «britannique» de la neutralité. Le ministre affirme ensuite qu'une priorisation payante du trafic est non seulement acceptable, mais doit même être encouragée.

Il décrit deux principes devant s'appliquer pour un tel scénario. Le premier est «l'ouverture», les internautes devant pouvoir accéder librement aux contenus ou services légaux. Ed Vaizey appelle ensuite à la transparence, notamment sur le sujet des politiques de régulation du trafic mises en place par les opérateurs. On reste finalement dans le cadre de la rhétorique classique qui consiste à soi-disant défendre un Internet «ouvert» et «transparent» (ce qui ne veut pas dire grand chose) pour mieux saborder la neutralité.

Selon lui, la mise en place d'un internet à deux vitesses est justifiée par la rapide croissance du trafic qui mettrait en danger la qualité du service. Pour éviter cette «baisse de qualité» gouvernement devrait «continuer à encourager le marché à innover et à expérimenter avec différents modèles économiques» . Dans les faits, il s'agit bel et bien de faire payer les sites (notamment les plus consommateurs de bande passante comme YouTube) pour un accès plus rapide à leur contenu. Chaque fournisseur d'accès pourrait donc avoir sa propre liste de sites «accélérés». Toujours dans cette optique, la «neutralité» (version Ed Vaizey) serait maintenue par le fait que les abonnés puissent toujours quitter leur opérateur si les conditions ne leur conviennent pas.

Même si l'association des FAI locaux se réjouit de ces prises de positions très libérales, la grande majorité des réactions oscille entre le scepticisme et la critique virulente. L'association de défense des droits numériques Open Rights Group s'inquiète : «Il semble que les autorités de régulations et les ministres de notre gouvernement ne voient pas le futur de l'Internet comme étant mieux servi par la compétition mais souhaitent encourager la création de "chasses gardées" pour les services des FAI.»

Plus étonnante, la réaction de Peter Gabriel. L'ex-Genesis est impliqué sur le net en investissant dans plusieurs compagnies de services en ligne. Interrogé par le Guardian , le chanteur se déclare inquiet : «La liberté d'accès à l'information va être un champ de bataille très contesté. Elle est vitale pour une démocratie libre et ouverte : la neutralité du net bénéficie à tout le monde.»

Les tensions entre FAI et producteurs de contenus continuent, elles, de s'aggraver. La BBC a déjà annoncé qu'elle préviendrait les internautes utilisant ses services de vidéo en ligne si les opérateurs avaient l'indélicatesse de brider les débits. La vénérable institution déclare par l'intermédiaire de son directeur des nouvelles technologies qu'il était «hautement improbable» qu'elle accepte de payer pour garantir un accès «favorisé» à ses contenus.

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