Amis de Silence on joue, bonjour !

Ecoutant votre émission depuis quelques mois, j'éprouve le besoin de me confier à vous car la quarantaine récemment franchie, je sens lentement et inexorablement la fibre vidéo-ludique me quitter. Je continue à m'intéresser au jeu vidéo en suivant l'actualité, grâce à vous entre autres, et rien y fait : l'envie d'allumer ma PS3, de prendre le pad en main, de jouer, tout cela s'éloigne. Comment en suis-je arrivé là ? Je pense forcément que mon âge avancé explique en partie ce processus. Pourtant de nombreux journalistes, peut être comme vous, sont de ma génération, et j'ai l'impression que la communauté vieillissante arrive encore à s'accrocher aux branches de cet art. Avant ma mort vidéo-ludique, je tiens à rédiger mon testament en évoquant mes joies et déceptions du jeu vidéo.

Je me souviens d'abord de mon Atari 800XL. Pour jouer, nous tapions de longues lignes en basic provenant du feu journal Hebdogiciel. Imaginez passer 4 heures à saisir des données pour jouer à des jeux discutables. Cerise sur le gâteau, lorsque j'éteignais l'ordinateur, rien n'était sauvegardé car, tout au début, je n'avais pas d'unité de sauvegarde ! Sur cet ordinateur, je me souviens de Pitfall 2, Decathlon (en cartouche) qui m'ont procuré des heures et des heures de plaisir.

Ensuite l'arrivée de l'Amiga 500 a été une première claque graphique. Defender of the crown et tous les jeux Cinemaware faisaient scintiller nos pupilles. Avec le recul, et sur la base de vagues souvenirs, le gameplay de ces jeux était relativement discutable.
L'internet naissant, le PC a élu domicile chez moi et c'est vers des jeux tels que Command&Conquer que mon intérêt s'est porté.

Parallèlement, la Playstation a fait son apparition et la première fois que j'ai vu des jeux en 3D temps réel, j'ai été ébahi. La Playstation venait du Japon et les premières heures passées sur Tekken et Ridge Racer resteront à jamais gravées dans ma mémoire.
Je dois également à la Playstation le jeu qui m'a  procuré le plus de plaisir vidéo-ludique. le feu magazine Joypad avait peut-être, pour la première fois, noté un jeu 100 %. Il s'agit de Resident Evil, véritable film interactif aux graphismes, pour l'époque, tout simplement hallucinants.

La Playstation 2 a forcément pris le relais. Finalement seuls Ico, Shadow of the Colossus perdurent dans ma mémoire. J'ajoute bien entendu GTA 3 qui représente pour moi la première expérience de liberté totale dans un jeu vidéo. SOCOM 2 fut aussi jouissif puisque, pour la première fois, je faisais partie d'une ligue de joueurs en ligne sur le mode multi du jeu.

Nintendo, avec ses consoles portables,  la Gameboy, mais surtout la DS, a su éveiller ma curiosité et je dois dire que pour une première approche du jeu tactile avec un stylet, ce fut un coup de maître. C'est peut-être la seule fois que j'avais l'impression qu'on pouvait changer notre façon de jouer en s'exonérant de la manette. Je pense à tous les jeux de réflexion sur DS (Layton, Ghost trick, Phoenix Wright...) mais aussi à Zelda dont la manipulation au stylet est géniale.

Bien sûr Nintendo, avec la Wii, a encore voulu révolutionner notre façon de jouer. Pour ma part, la promesse n'a été que partiellement tenue. Et au final, très peu de jeux ont exploité de manière optimale le motion gaming. Grâce à la Wii j'ai bien entendu pu jouer à différents épisodes de Zelda : Twilight Princess, Ocarina of Time, et Windwaker. Les Zelda représentent pour moi toute la quintessence du jeu d' action-aventure. J'ai tout récemment acquis Skyward sword mais le mal était déjà en moi et l'envie s'est rapidement estompée après les premières heures de jeu.

Je n'omets pas la console la plus récente, la Playstation 3, acquise à l'occasion de la sortie de GTA 4. Les meilleurs souvenirs sur cette console sont finalement assez restreints : GTA 4, Fifa 12, et puis... plus aucune idée ; et dieu sait que j'aie pu en acheter des jeux...
Concernant la Playstation 3, j'ai aussi le sentiment que la promesse des jeux en HD n'a que partiellement été tenue. 

Je me demande finalement si les promesses non tenues évoquées précédemment n'ont pas commencé à fissurer mon édifice du jeu vidéo. Ces derniers jours, en écoutant les reportages relatifs à l'E3 2012, j'avais l'impression que le jeu vidéo tourne en boucle depuis un certain temps et, à mon avis, la fin de vie des consoles actuelles n'explique pas tout. En effet, les genres ont-ils vraiment évolué ? Graphiquement certainement, mais ca s'arrête là. Les mécaniques de jeux sont toujours les mêmes tout comme les techniques pour battre les boss. A l'instar d'une chanson qui enchaine, couplet, refrain, couplet, refrain, solo, refrain, le jeu vidéo enchaine exploration, boss, exploration, boss, rebondissement, boss final.
Même une nouvelle interface comme la Wii U semble laisser indifférente la communauté du jeu vidéo. Je ne parle même pas de Knect qui, à mon sens, est le dernier piège à con pour joueurs en mal de sensation forte.

Désespéré, j'ai in extremis réussi à m'accrocher à une dernière branche. En effet j'ai commencé depuis peu à m'intéresser au monde de la simulation aéronautique. Et je dois bien avouer que les heures récentes passées sur Flight Simulator X à essayer d'allumer les moteurs d'un Boeing 737, après avoir lu 200 pages d'explications en anglais, ont refait surgir en moi tout le plaisir que j'attends de cet art. Reste à savoir s'il s'agit encore de jeu vidéo, le débat est ouvert.

Alors pourquoi toutes ces lignes ? En fait j'aimerais savoir si vous, comme moi, sentez l'intérêt pour le jeu vidéo s'estomper peu à peu ? Peut-être simplement des doutes ou lassitudes passagères ? N'avez vous pas le sentiment d'un manque de renouveau ?

En vous remerciant pour le temps que vous consacrerez à cette lecture et en vous félicitant pour votre podcast,

Manu, Strasbourg, 40 ans