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Libération

A cent mètres, Google tourne à gauche

par Camille Gévaudan
publié le 29 octobre 2009 à 12h24

Après l'application Google Maps pour téléphones mobiles et le service de géolocalisation Latitude, Google était attendu sur le marché des logiciels de navigation routière. Des rumeurs relayées entre autres par le magazine Forbes prévoyaient depuis quelques jours le lancement d'une petite «bombe» , s'appuyant sur une liste d'indices tels que la prise d'indépendance sur les relevés cartographiques aux États-Unis , le succès commercial des logiciels de navigation et l'intérêt actuel de Google pour les cartes sur téléphone mobile, la sortie prochaine de la version 2.0 de leur système d'exploitation Android... et le refus de tout commentaire sur le sujet par les porte-paroles de l'entreprise.

L'annonce a été faite hier sur leur blog officiel : «Nous sommes heureux d'annoncer la prochaine étape pour la version mobile de Google Maps : Google Maps Navigation sur les appareils Android 2.0.» Vues en perspective, guidage vocal et recalcul automatique de la trajectoire : «tout ce que vous attendez d'un système de navigation GPS» . Et comme tout ce que développe Google à destination du grand public, c'est gratuit. Le service ne devrait être lancé initialement qu'aux États-Unis, et les téléphones Verizon Droid du fabricant HTC seront les premiers à proposer Maps Navigation. Il est également prévu que l'application soit disponible sur iPhone, à condition qu'elle soit validée par Apple.

Le logiciel intègrera en plus une palette de fonctionnalités inédites chez ses concurrents, tirant parti de la connexion internet du téléphone mobile (qui devra donc capter un réseau et sans doute rester connecté en permanence) pour utiliser les services qui font le succès de Google Maps. L'imagerie satellite et les visualisations de Street View, notamment. Un double-clic tactile sur l'écran du mobile fera basculer à tout moment la navigation en mode photographique tel qu'on le connaît dans sa version Internet classique, et la photo de l'adresse de destination devrait s'afficher automatiquement à l'écran lorsque le véhicule s'en approche. Maps Navigation fait également un pas de géant dans la recherche des lieux : alors que les autres logiciels GPS ne reconnaissent que les noms de rues ou de villes, celui de Google comprendra les instructions du type «novotel reims» ou «bar de l'océan vannes»... et les consignes vocales. Google promet dans sa présentation que demander à son mobile, à voix haute, «Aller à la place Pike à Seattle» sera correctement interprétée. Enfin, il sera possible de superposer à la carte de navigation des calques affichant l'état du trafic routier (localisation des accidents compris) ou n'importe quelle carte personnalisée créée sur Google Maps.

Maps Navigation risque fort de bouleverser le marché de la navigation GPS en proposant gratuitement un service bien plus riche que celui de ses concurrents payants. D'autant plus que ses cartes, n'étant pas téléchargées sur le mobile mais affichées directement depuis les serveurs de Google, intègreront toujours les mises à jour les plus récentes sans qu'il soit besoin de les actualiser manuellement. La facturation des mises à jour est effectivement un des aspects les plus impopulaires des TomTom, Via Michelin et autres Garmin. Comme l'exprimait clairement un contributeur du projet OpenStreetMap dans l'interview collective réalisée par Ecrans.fr, beaucoup d'utilisateurs trouvent détestable de devoir «banquer régulièrement pour pouvoir utiliser un produit déjà acheté» .

Une porte-parole de TeleNav interrogée dans l'article de Forbes se disait persuadée que «les gens veulent bien payer pour avoir quelque chose qui fonctionne tout le temps» , opposant le monde du GPS commercial à celui d'Internet où «tout est gratuit et toujours en bêta» . Elle expliquait que des millions de clients choisissent d'utiliser un service payant pour «sa fiabilité, sa facilité d'utilisation et son offre de fonctionnalités supplémentaires» . Ses arguments risquent d'être aussi ébranlés que le cours des actions TomTom (-21%) et Garmin (-17%) depuis hier soir. Aujourd'hui incapables de suivre Google dans la gratuité et sévèrement concurrencés au niveau des services ajoutés, ces éditeurs pourront toutefois mettre en avant l'absence de publicité sur leurs logiciels de navigation. Car si Google a annoncé que Maps Navigation sortira sans pub, il devrait intégrer par la suite des liens sponsorisés tels qu'ils s'affichent actuellement dans la version mobile de Maps.

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