Menu
Libération

Le tatouage numérique pour succéder aux DRM?

Une technologie inaudible, et indolore, pourrait remplacer les pénibles verrous numériques.
par Sébastien Delahaye
publié le 17 août 2007 à 17h43

Depuis ses débuts, la vente de musique en ligne se heurte à un gros souci: la présence, exigée par les majors du disque, de verrous numériques (DRM, pour Digital Rights Management ). Les DRM, intégrés dans chaque fichier audio acheté, empêchent le consommateur d'utiliser ses morceaux à sa guise: un fichier audio acheté sur Itunes ne sera par exemple lisible qu'avec un Ipod, et inversement les morceaux au format Windows Media fonctionnent partout sauf sur le baladeur d'Apple. A cela s'ajoutent des limites à la copie des fichiers. Devant la grogne des internautes, la tendance «tout DRM» a commencé à s'inverser en début d'année. En avril, la major EMI annonçait la mise à disposition de l'intégralité de son catalogue sans verrou numérique sur la plupart des plateformes de téléchargement légal, mais pour un prix sensiblement plus élevé qu'un morceau avec DRM.

La semaine dernière, c'est Universal, la plus puissante des majors, qui a annoncé la mise en vente de morceaux sans DRM. Cette fois, seule une partie du catalogue est concernée, et pour une durée de six mois seulement. L'entreprise décidera, suivant les résultats, de la poursuite ou non de l'opération. Mais au contraire d'EMI, pour Universal, l'absence de verrou numérique ne signifie pas pour autant absence de surveillance. La major inaugurera un nouveau système: ses mp3 seront dotés de ce que l'on appelle «filigrane» ou «tatouage numérique» (un «watermark» en jargon). Ces tatouages numériques, intégrés aux fichiers mais inaudibles à l'oreille, contiendront des informations permettant d'identifier à coup sûr les morceaux, même en cas de changement de nom. Contrairement aux DRM, ils ne devraient poser aucun problème d'utilisation. Pour Universal, l'intérêt des watermarks n'est pas d'identifier les utilisateurs (ce qui n'est semble-t-il pas au programme), mais plutôt de vérifier si les morceaux achetés sont ensuite mis en ligne sur les réseaux de téléchargement illégal. Ce qui devrait aider Universal à décider ou non du prolongement de l'expérience dans six mois.

Après avoir envahi le monde de la photo au début des années 2000, les tatouages numériques sont également aujourd'hui à la mode dans le domaine du partage de vidéos. Des sites comme Youtube, Myspace ou Dailymotion, qui contiennent de très nombreux contenus protégés, utilisent ainsi des technologies de «watermarking» , notamment fournies par l'entreprise américaine Audible Magic. Ici, le but est d'identifier les contenus copyrightés pour empêcher leur mise en ligne. Le résultat est cependant loin d'être parfait , comme le reconnaissait d'ailleurs en juillet Benjamin Bejbaum, patron de Dailymotion: «on n'aura jamais 100% de fiabilité. Mais le système est très performant et l'objectif des ayants droit n'est pas de se focaliser sur les 2 ou 3% de contenus qui passeront à travers les mailles du filet» . De son côté, Microsoft, dont le format Windows Media est utilisé, avec des DRM, par de très nombreuses plateformes de vente de musique en ligne, travaille également à sa propre technologie de tatouage numérique pour les fichiers audio. Moins restrictive pour les utilisateurs, la solution pourrait avantageusement remplacer les verrous numériques.

Lire les réactions à cet article.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique