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Libération

Quand le porno vide les bourses des coproducteurs

Marc Dorcel s'est tourné vers les internautes pour cofinancer sa future production : le succès est au rendez-vous.
par Alexandre Hervaud
publié le 27 avril 2010 à 13h07
(mis à jour le 27 avril 2010 à 14h48)

Il y a une semaine, l'entreprise trentenaire Marc Dorcel se lançait dans le grand bain de la coproduction de film X avec les internautes, via la plateforme MyDorcel . L'objectif fixé : 85000 euros (sur un budget total de 185000 euros), un chiffre plus que confortable de nos jours, le prix moyen d'une production française étant aux environs de 5000 euros. Les deux productions mensuelles de Dorcel bénéficient en moyenne d'un budget situé entre 60 et 80000 euros, avec des pointes à  120 et 200k€ pour les deux grosses prods annuelles. Restait à savoir si ces coquins d'internautes, conviés à investir une part minimale de 20 euros (avec la formule habituelle, à savoir un nombre d'avantages proportionnel aux sommes versées), allaient jouer le jeu.

Spot safe for work

Résultat sans appel : par l'odeur de fesses alléchés, les internautes se sont rués en masse sur leur CB, permettant aux 85000 euros d'être réunis en 78 heures avec plus de 600 inscrits ! A titre d'exemple, La Horde , le film de zombie co-produit par les internautes n'avait réuni en plusieurs mois que 47000 euros via Motion Sponsor ...

De quoi donc parlera cette production réalisée par Hervé Bodilis ( Casino No Limit ), intitulée Mademoiselle de Paris ? A priori d'une jeune fille pas farouche évoluant dans la capitale française (info exclusive d'Ecrans.fr déduite par nos experts en déchiffrant le titre, puisque le scénario n'est pas encore écrit). Le concept du porn crowdfunding mûrit dans les méninges dorcelloises depuis près d'un an. Les internautes investisseurs seront invités à débattre et échanger sur «le choix du casting, des décors, du scénario, des photos, du visuel» . Avec sans surprise un large avantage aux plus généreux : les trois internautes ayant investi 5000 euros assisteront au tournage prévu en région parisienne pour le début du mois de juin. Par «assister», comprendre «regarder», et non «jouer dans le film». Au moins, dans La Horde , on pouvait se marrer déguisés en zombies.

La limite vaut également pour le Jerry Bruckheimer du boulard qui a versé 10000 euros avec à la clé «la possibilité de diriger sa propre scène avec l'équipe du film.» . Les seules faveurs qu'exauceront pour lui l'équipe du film se limiteront à mettre en scène «ses fantasmes» devant l'objectif de la caméra, si les moyens le permettent. «Par exemple si son truc c'est d'imaginer une infirmière avec un marin, on pourra peut-être l'intégrer» , illustre Ghislain Faribeault, directeur des opérations et nouveaux médias chez Dorcel. Une fois de plus, il précise bien que coproducteur ne rime pas ici avec acteur, au grand dam de dizaine d'internautes lui ayant posé la question par mail. «Sinon ce n'est plus de la coprod', mais du proxénétisme, hein» , analyse-t-il fort justement.

En terme de profil, on a appris sans grande surprise que 91% des coproducteurs sont des hommes (c'était du moins le cas il y a 6 jours), âgés en grande partie (60%) de 18 à 30 ans, suivis par les 30-40 ans qui représentent 30% des donneurs, le tout principalement originaires de la région parisienne. Le résultat de cette orgie filmique sera visible en VOD en septembre, pour une sortie DVD prévue en octobre. On est curieux de voir le générique du film (entre autres), afin de savoir si les internautes assumeront totalement leur effort financier en signant de leur vrai nom, ou si, tel un Fred Coppula, on assistera à l'invention de blases accrocheurs.

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