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Libération

Ayez confiance, le gouvernement s'occupe d'Internet

par Astrid GIRARDEAU
publié le 23 octobre 2008 à 18h13
(mis à jour le 24 octobre 2008 à 10h01)

En juin dernier, PC Inpact révélait l'élaboration d'une charte pour la «confiance en ligne », . Un document qui, élaboré par le gouvernement pour améliorer la sécurité des internautes et protéger les mineurs des contenus pornographiques, ouvre la brèche d'un filtrage du net français.

Aujourd'hui, nos confrères se sont procurés un document de dix pages présentant les grandes lignes de ce projet qui souhaite «faire de l'internet un environnement plus sûr pour tous les citoyens» . Un plan dans la lignée directe des volontés exprimées depuis des mois par différents membres du gouvernement français. Dernière en date, Nadine Morano, secrétaire d'État à la Famille, et son projet «d'instaurer une police internationale de la Toile» .

Parmi les signataires, on retrouve donc naturellement les ministère de l'Intérieur, de la Justice, de l'Industrie, le secrétariat à l'Economie Numérique et celui à la Famille. Et du côté des acteurs du net, les fournisseurs d'accès à Internet, opérateurs mobiles et hébergeurs représentés par l'AFA, l'AFOM, la FFTCE, l'Aforts et Wirelesslink. Grand absent au débat, l'ASIC, l'organisation qui représente les principaux services communautaires et hébergeurs (Google, Dailymotion, Yahoo, etc.).

Le document est divisé en trois parties : les engagements des fournisseurs de services, ceux de l'Etat, et enfin les engagements mutuels.

Pour le premier point, un certain nombre de mesures déjà connues restent floues. Par exemple les FAI devront «mettre en œuvre un processus de veille pour la gestion des risques techniques émergents pour [les] équipements de connexion» , « diffuser dans les meilleures conditions possible les informations nécessaires à leurs mises à jour de sécurité lorsqu'elles existent » , et enfin «faire les meilleurs efforts pour faire adapter les configurations par défaut des équipements mis à disposition.»

Toute une partie fait référence à la nécessité d'information les internautes, surtout les plus jeunes, sur la sécurité ou la protection des données personnelles. Le plan prévoit une «charte de l'internaute» qui pourra être «intégrée dans les conditions générales d'utilisation des hébergeurs» . Elle prévoit notamment de «rappeler les règles de droit de tout auteur de contenu» , « les comportements et contenus autorisés ou interdits» , « l'information des internautes sur les moyens techniques permettant de modérer les contenus associés à leurs créations (blogs, forums, etc.), de suspendre la possibilité des tiers de répondre ou commenter leurs créations sur leur espace et de le supprimer».

Concernant les engagements des fournisseurs vis-à-vis de l'Etat, cela reste également assez opaque. Malgré l'existence de la loi LCEN qui, comme cela est rappelé au début du document, définit le régime juridique des acteurs d'Internet, le texte insiste lourdement pour que ces derniers « mettent en place une procédure de retrait et de suspension adéquate» . Surtout, il demande aux fournisseurs de «participer à la politique de signalement» du gouvernement. Soit volontairement et «conformément à leur obligation citoyenne» , de signaler «les contenus qui leur sont rapportés faisant état d'un danger pour la sécurité des personnes et des biens» . C'est-à-dire les messages à caractère violent, pornographique, pédo-pornographique, de nature à porter gravement atteinte à la dignité, faisant l'apologie de crimes, etc.

Surtout, il revient aux FAI de mettre en œuvre -- «dans des conditions qui seront précisées par la loi et par les moyens techniques qu'ils estiment les plus appropriés» -- un dispositif de lutte contre les sites contenant des image de caractère pédo-pornographique hébergés à l'étranger. Aucune information n'est donc donnée ni sur les panoplies techniques envisagées, ni sur leurs coûts d'un tel système. Une question pourtant essentielle quand on sait l'impossibilité actuelle de filtrer les seuls réseaux p2p .

Enfin, de son côté, l'Etat s'engage principalement à «la mise en place des dispositions législatives, règlementaires et/ou organisationnelles permettant de lutter plus efficacement contre le spam et les infractions connexes par réseaux de communications électroniques, ainsi que contre les reversements associés» .

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