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Libération

La fin des DRM, un mirage ?

par Astrid GIRARDEAU
publié le 30 mars 2009 à 12h51
(mis à jour le 30 mars 2009 à 16h55)

«Les DRM, c'est fini !». Un message ressassé depuis les annonces successives d'Universal, Warner, Sony, et Apple sur la suppression des verrous numériques de leur catalogue. Et Christine Albanel de se féliciter que «cela anticipe de plus d'un an la mise en œuvre des engagements» souscrits par les ayants droit lors des accords de l'Élysée du 23 novembre 2007. Mais qu'en est-il vraiment ?

La garantie des majors du disque est une chose, la réalité du consommateur en est une autre. Les DRM n'ont pas été totalement supprimés du marché. On les retrouve, par exemple, dans des offres d'écoute ou de téléchargement illimité proposées par les fournisseurs d'accès à Internet et opérateurs de téléphone, comme Musique Max d'Orange . «Les consommateurs ne sont pas stupides, ils n'ont pas pour habitude d'acheter à plusieurs reprises la même œuvre musicale, à raison d'une pour chaque support (...). Cela a conduit à l'abandon d'un certain nombre de DRM, mais contrairement à ce qui est affirmé, cet abandon n'est pas total , expliquait Martine Billard, le 12 mars dernier, devant l'Assemblée Nationale. C'est pourquoi nous demandons l'abrogation de ces DRM.» Elle soutenait alors l'amendement 311 visant à la «la disparition progressive des mesures techniques de protection qui restreignent l'interopérabilité et l'usage du fichier, donc son utilité» .

Ce texte (rejeté) demandait ainsi que les mesures techniques soient admises «jusqu'au 31 décembre 2009 pour la musique et au 31 décembre 2011 pour les œuvres cinématographiques.» En effet, la problématique des DRM ne se cantonne pas à la musique, elle concerne également le cinéma, les jeux vidéo, les logiciels ou encore les livres numériques. Et on se souvient qu'une dizaine d'organisations représentatives du 7e art (ARP, BLIC, SFA, etc.) était présente lors de la signature des accords Olivennes.

«La suppression des DRM sur le cinéma est totalement impossible, puisque ceux-ci sont à la base de la vidéo à la demande : les films peuvent être regardés dans un laps de temps limité grâce aux mesures techniques de protection» , a réagi Christine Albanel à l'amendement 311. C'est en effet ce qu'on avait pu remarquer avec le catalogue VOD de Carrefour , dont les DRM empêchent également la lecture du titre sur un ordinateur autre que celui qui a servi à son achat. La ministre et le rapporteur Franck Riester ont également soutenus que la suppression des DRM ne pouvait qu'être contractuelle, car priver les DRM de protection juridique serait «inconstitutionnel et incompatible avec le droit communautaire» .

«Certes, tous les DRM n'ont pas disparu, mais, et c'est déjà très important, les DRM liés au téléchargement à l'acte sont supprimés. Toutes les grandes sociétés – Universal, Sony, Warner, EMI, etc. – et toutes les grandes plates-formes telles que Virgin et la FNAC sont concernées» , a commenté Christine Albanel à propos d'un autre amendement, le 421 , visant à garantir l'interopérabilité, et également rejeté. Avant d'ajouter : «Les autres DRM, que ce soit pour les abonnements musicaux sur Internet ou pour le cinéma, servent à moduler l'offre légale et à la rendre possible.»

«Et les logiciels multimédias ?» , a posé le député Nouveau Centre Jean Dionis du Séjour. «Si on entre dans cette logique, cela signifie que tous les produits Microsoft, par exemple, deviennent piratables et que l'on peut se les approprier» , lui a répondu la ministre. Justement, la semaine dernière, à l'occasion du GDC 2009, Microsoft a présenté son nouvel arsenal de protection numérique -- «n'appelez pas ça des DRM» -- contre le piratage de jeux vidéo.

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