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SFR, bien obligé de se remuer

par Catherine Maussion
publié le 7 juin 2011 à 17h00

Est- ce la «Révolution», comme le prétend Frank Esser, le patron de SFR, en présentant ce matin sa nouvelle gamme de forfaits mobiles qui sera commercialisée le 15 juin ? Certainement pas. Mais le nouveau chemin emprunté de l'opérateur marque une vraie rupture. Qu'on en juge:

Premier petit séisme, les abonnés actuels chez SFR parvenus en fin de période d'engagement -- une majorité sont liés pour 24 mois -- recevront une lettre (ou un mail) leur donnant à choisir entre renouveler leur mobile ou alors, si ce dernier fait l'affaire, obtenir une ristourne de quelques euros sur leur abonnement. «Ce sera automatique» , a promis hier SFR. Même traitement pour les nouveaux abonnés. Ainsi pour tous les clients SFR, une fois terminée le purgatoire de 12 ou 24 mois associé à la fourniture du mobile, le tarif baissera d'office, si l'on ne change pas d'engin.

Selon l'exemple donné par SFR ce matin, la petite révolution fera passer le forfait Carré Web (préconisé pour les smartphones) avec 2h de voix de 49 euros à 42 euros par mois, soit une réduction de 7 euros si l'abonné ne veut pas se réengager. Et à 37 euros par mois, soit 12 euros de moins, s'il accepte de repartir avec SFR pour 12 mois. S'ajoutent à tout cela 10 euros de ristourne pour les clients à la box SFR -- fibre ou ADSL.

Second petit séisme, tous les forfaits peuvent être souscrits en 4 versions : avec ou sans mobile, et avec ou sans engagement. SFR poursuit ainsi son incursion dans le «Sim Only», la fourniture de forfaits sans mobile et donc moins cher, en systématisant la pratique. De l'aveu de Frank Cadoret, cette formule, lancée discrètement l'an dernier à des fins de test, s'est taillée un franc succès: «on s'attendait à séduire 10 % de clients» . Moins d'un an après, «ils sont 15 %» .

Ainsi les affirmations à l'emporte pièce des opérateurs, sur le mode «nos abonnés plébiscitent les engagements sur 24 mois, parce que cela leur permet d'avoir un nouveau mobile et un abonnement pas trop cher», se fissurent alors que la pression monte. Celle d'abord des pouvoirs publics et du régulateur des télécoms, qui font la chasse aux durées longues d'engagement. Celle aussi des MVNO (opérateurs mobiles virtuels) dont la part de marché monte en flèche depuis janvier et qui donnent l'exemple. Ainsi La Poste Mobile, lancé le 23 mai dernier, décline-t-il tous ses forfaits dans une formule sans mobile et sans engagement , pour 5 euros de moins par mois. SFR, qui prête son réseau à La Poste et possède 49% de La Poste Mobile , est un peu forcé d'embrayer. Et il y a surtout la pression de Free, dont les offres mobiles pourraient débouler dès Noël prochain et qui a déjà fait savoir qu'il ne subventionnerait pas de mobile -- celui-ci sera proposé à part.

Chez SFR, on ne cachait pas ce matin que ce pourrait être aussi la prochaine étape: dissocier le forfait de l'acquisition du smartphone pour aller vers «la transparence» que revendique aujourd'hui l'opérateur. C'est aussi une réponse au régulateur qui fustigeait, il y a quelques semaines, les fortes subventions aux mobiles cachées dans des forfaits coûteux et qui sont facteurs d'opacité.

La nouvelle gamme est-elle aussi simple et claire que SFR le prétend ? On n'y est pas encore. Ce n'est pas non plus une offre à la carte que chaque abonné construit en fonction de sa consommation. La gamme Carré Web est déclinée ainsi selon trois niveaux de consommation pour la voix (2h, 5h, et 8h), mais le volume de voix n'est pas indépendant de la consommation data. Pour 5h, l'abonné a droit ainsi à 2 Go de data pour l'internet et le mail. En prime, SFR offre la télévision de rattrapage (catch-up TV). Mais si l'on veut pouvoir utiliser sa connexion Internet sur son PC portable ou son iPad (le «multisurf» dans le jargon SFR), il faut passer au palier de voix supérieur (8h). Dans ce cas, l'opérateur alloue 1 Go supplémentaire pour surfer ailleurs que sur son mobile, en utilisant celui-ci comme un modem.

À noter encore, la possibilité d'acheter des Go de data comme on achète un rab' de voix quand on est au bout de son forfait (5 euros les 250 Mo). Bon point: un compteur pour suivre heure après heure sa consommation de données pour le surf, les jeux vidéo, le mail...

Vous avez dit «révolution»? Décidément le terme fait en ce moment florès. Pré-empté dès décembre par Iliad au lancement de sa Freebox Révolution, kidnappé par Numericable lors du lancement tonitruant de son forfait mobile illimité à 24,90 euros pour les clients câblés, il est revendiqué aujourd'hui par SFR. On connaissait le 22 à Asnières . Voici le 1789 !

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