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Libération

Création et Internet: «On peut espérer des surprises»

par Astrid GIRARDEAU
publié le 27 mars 2009 à 18h10
(mis à jour le 28 mars 2009 à 9h53)

Alors que l'examen du projet de loi Création et Internet reprend ce lundi après-midi à l'Assemblée Nationale, le député Patrice Martin-Lalande (UMP) se dit prêt à «y aller joyeusement» car au moins là, « contrairement à la loi sur l'audiovisuel, il y a des vrais débats» . La semaine dernière, il a déposé, avec le député Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre), cinq amendements (1) qui prévoient la mise en place immédiate d'un système d'amende, et de repousser, sous certaines conditions, la mise en œuvre de la suspension de l'abonnement à 2011 au plus tard. Le gouvernement serait-il prêt à les adopter et donc abandonner partiellement la coupure comme les «derniers bruits de couloir» peuvent le laisser croire ? Nous avons contacté le député du Loir-et Cher

pour en savoir plus. Le cabinet de Christine Albanel nous a répondu de son côté .

Des bruits de couloir circulent comme quoi le gouvernement pourrait revenir sur l'amende...

_ Je ne peux pas vous répondre. Mon souhait, et celui de Jean Dionis du Séjour, c'est de ne pas mettre tout de suite en place la suspension, qui n'est d'ailleurs pas faisable vus les investissements nécessaires, et d'expérimenter l'amende. Ensuite de faire un bilan, pour voir si elle donne des résultats significatifs sur la baisse du téléchargement illégal, et pour vérifier si le système de suspension est euro-compatible. Et au premier janvier 2011, on pourra décider si on renonce ou non à mettre en place la suspension.

Je crois qu'il est intéressant et sage de développer un système équilibré, progressif et gradué. Et qu'on laisse le temps d'affinement du projet pour aller plus loin dans l'examen des coûts, estimés à 70 millions sur trois ans, dans la conformité avec l'Europe, ou dans les études sur la gestion des paquets sur le réseau.

Vous parlez de constater si le système d'amende aura permis de «réduire significativement la contrefaçon» . A quels volumes cela correspond-il ? Quels sont les objectifs ? Et quels sont les objectifs même de la loi Création et Internet ?

_ Nous parlons seulement d'un effet sérieux. Il ne faut pas fixer dans la loi des choses très précises. Laissons au gouvernement, au Parlement, et à l'Hadopi qui selon l'[amendement 474

serait chargé de ce constat] décider de l'efficacité ou non de la sanction sous forme d'amende.

Quel serait le montant de cette amende ?

_ Il s'agit d'une contravention de première classe, donc de trente-huit euros.

Par œuvre ? (la mention «pour chaque œuvre» de l'amendement 472 a été retiré)

_ Par œuvre ou par session. Ce n'est pas encore défini. Le but de ce système est qu'il soit dissuasif.

Selon Christine Albanel «une amende serait gênante, car ça serait faire payer les jeunes alors qu’ils n’ont pas d’argent » ...

_ Je ne peux que partager le fait que l'amende est plus lourde à supporter pour les gens qui n'ont pas d'argent que pour ceux qui en ont. Mais ça n'est pas parce que l'amende a un aspect inégalitaire que la coupure de l'accès à Internet à toutes les vertus égalitaires. Au contraire, elle risque de pénaliser très inégalement les internautes.

Et vous savez si sa position a changé depuis ?

_ Je suis en contact avec son cabinet. Pour tout vous dire, je les ai rencontré mercredi soir, et ils se sont dit «ouverts à la discussion» , et «pas fermés à certaines évolutions» . Il y a aussi les positions au niveau Européen, et le vote encore hier du rapport Lambrinidis . Après, la position française n'est pas tenue d'être liée au Parlement Européen.

Le vote de l'amendement 138/46 du Paquet Télécom pourrait être contraignant ?

_ Oui. J'ai d'ailleurs déposé l' amendement 200 qui reprenait la définition d'Internet comme un droit fondamental, car il me semble, oui, que c'est devenu un droit. L'amendement a été [rejeté, après de houleux débats , le 12 mars dernier].

Qu'attendez-vous de la reprise des débats ?

_ Ca va être intéressant. Et je suis confiant dans la possibilité de faire bouger les choses positivement. Dans le domaine d'Internet, c'est l'effervescence permanente. Ne nous plaignons pas des progrès permanents. Mais, du coup, légiférer dessus est risqué. Au mieux, ça ne peut qu'être, comme je l'appelle, qu'une législation «techno-dégradable». On doit s'adapter non seulement aux nouvelles technologies, mais aussi aux nouveaux usages et aspects économiques. Donc prendre son temps, c'est prendre les moyens de légiférer de manière efficace.

On peut s'attendre à des surprises ?

_ On peut espérer des surprises.

Et pour un vote du texte...

_ Dès mercredi ou jeudi.

(1) Il s'agit des amendements 470 , 471 , 472 , http://www.assemblee-nationale.fr/13/amendements/1240/124000473.asp, déposés à l'origine le 20 mars et et rectifiées hier après-midi, et de l' amendement 474 rajouté hier. Les 470 et 472 ont également été déposés par le député Alain Suguenot.

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